Que du quotidien et rien d'autre. Aujourd'hui, le voyage de retour dans le wagon à bestiaux tenait du pur exploit. Vingt minutes de retard dès le point de départ. Avouez que ça commençait mal. Et un trafic à vous donner envie de marcher jusqu'à la maison, même si mort s'ensuit. Car tout était bloqué. Partout.
Seul bonheur dans mon sombre
horizon : j'étais assise. Ce coin de ciel bleu fut cependant de courte durée. En effet, le chauffeur, prévoyant sans doute la randonnée qui s'éternise, avait décidé de garder ses bestiaux au frais. J'avais les pieds gelés. À l'imprudence (ou
devrais-je plutôt dire ici l'impudence) que j'avais eue d'enlever mon chapeau, j'ai dû bien vite remédier avant que mon cerveau ne prenne en glace.
Comble de malheur, je suis tombée de façon évidemment involontaire sur un autobus rempli de bibliothécaires! Un silence de mort régnait. Pour une fois que j'avais envie d'entendre les potins insignifiants, mais parfois juteux, du wagon, personne ne soufflait mot. À côté de moi, une étudiante ou une fonctionnaire zélée noircissait une tablette lignée. Elle était jeune. Ça faisait drôlement longtemps que je n'avais pas vu un spécimen de cette génération avec un crayon à la main. D'habitude, ce sont plutôt tous les bidules électroniques que ces moins de trente ans manipulent allégrement.
Alors, rien d'intéressant à babord. Voyons ce qui se passe à tribord. Zut! Un gros endormi. Ce n'est pas ce soir que je vais agrandir le cercle de mes amis. Que faire? Que faire! Je ne voulais pas me brancher
moi-même étant donné que je prévoyais aller marcher en arrivant à la maison et que je ne voulais pas souffrir d'une surdose de métal. En plus, ma batterie était pratiquement à plat. J'ai tout de même tenté d'écouter la radio. Oui, j'ai découvert il y a quelques jours, et cela par totale inadvertance, que mon lecteur mp3 était muni de la radio. Du moins, c'est ce que je crois mais je n'ai aucune preuve à l'appui puisque je n'ai pas réussi à écouter quoi que ce soit. Je pense avoir réussi à programmer un poste, sans plus. Tout ce que j'entendais, c'était des grichements. J'avais espéré au moins apprendre la raison pour laquelle nous nous retrouvions ainsi enlisés en plein coeur de la ville.
J'ai dû prendre mon mal en patience. Comme tout semblait vouloir se liguer contre moi, je n'éprouvais pour faire exprès aucune envie de tomber, même pour pas longtemps, dans les bras de Morphée. Faut dire que la pauvre avait déjà un lourd fardeau. Ça parle
peut-être pas des bibliothécaires, mais ça somnole en masse et en groupe.
Plus d'une
demi-heure après mon entrée dans le tombeau roulant, je constate que nous avançons un peu plus normalement. On dirait que le trafic se dégage sur l'autoroute. C'est pas trop tôt. Je me préparais à réveiller tout le monde et à caller un set carré. Et swing la baquaise dans l'fond d'la boîte à bois! Je ne sais pas si j'aurais eu du succès mais j'aurais eu le mérite, au moins, de proposer une activité de saison.
Finalement, une heure et des poussières plus tard, je mets le pied sur le trottoir familier. Il fait noir. Il fait froid. Ce n'est à peu près pas déblayé. Je suis écoeurée. J'éprouve beaucoup de difficulté ces
temps-ci à me motiver pour m'entraîner le soir justement à cause de ces voyages épuisants en transport commun. Depuis plusieurs semaines, à cause des zones sinistrées du boulevard, nous n'en finissons plus d'effectuer un retour bien mérité dans notre "maison sucrée maison" (une expression de l'Homme qui s'amuse à traduire les dictons de l'autre solitude - vous aurez reconnu ici "Home Sweet Home"). J'ai donc sauté dans mon pyjama plutôt que dans mes espadrilles. Heureusement qu'il y avait yoga ce midi. D'ailleurs, je suis certaine que vous aviez déjà noté la zénitude qui m'habitait tout au long de ce trajet vers l'abattoir.
Demain je suis en congé. Je fais tout à pied. Je ne veux même pas voir l'ombre de l'apparence d'un quelconque véhicule à moteur.
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