J'ai marché tard ce soir. De 21 h à 22 h. Pourquoi si tard, vous demandez-vous? Bof, grosse journée au bureau, douleur au pied. Mais la Fille veillait au grain. Elle a concocté le souper et nous a préparé, à l'Homme et à moi, une salade type niçoise à se rouler par terre. Et vous auriez dû voir la présentation. Digne des plus grands restaurants! Après ça, toute requinquée, j'ai attendu un petit deux heures et je me suis mise en route.
Ça faisait drôle d'être sur les trottoirs à la noirceur. Les fois où ça m'arrive, c'est plutôt en novembre et en décembre. Et il est tôt. Vers les 17 heures environ. Mais c'était agréable parce que la chaleur avait laissé la place à une légère brise. J'ai donc effectué mon parcours avec entrain... et inquiétude. On a beau dire qu'il ne faut pas avoir peur de son ombre, mais la nuit tous les chats sont gris. Je me rappelle pourtant une époque où la couleur des chats ne posait pas de problème.
Quand j'étudiais à l'université, à Québec, vers la fin des années soixante-dix, je prenais souvent l'autobus de 22 h ou même de 23 h le vendredi soir pour retourner à la maison la fin de semaine. J'arrivais aux environs de 1 h du matin. Le chauffeur me laissait à quelques coins de rue de chez mes parents et je marchais avec ma valise sans me soucier de rien. Je me souviens même combien j'aimais ce silence qui m'enveloppait, combien je trouvais rassurant toutes ces maisons endormies avec de temps à autre une lumière dans une fenêtre. Je n'hésitais même pas à emprunter un petit raccourci, en fait un simple sentier qui contournait l'arrière de deux ou trois maisons et qui permettait de rejoindre la rue qui me menait chez moi. Je marchais lentement en prenant tout mon temps car cela me permettait de reprendre contact avec mon chez-nous. C'était mon quartier. Je le connaissais depuis ma plus tendre enfance. Jamais il ne me serait venu à l'idée que je devais m'en méfier.
Comprenons-nous bien. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y avait aucun acte de vandalisme ou de violence quand j'étais plus jeune. C'est juste qu'il semblait y en avoir moins ou qu'on en entendait moins parler. Maintenant on ne nous épargne rien. On nous rapporte la nouvelle et tous les faits sordides qui l'accompagnent. Pas étonnant ensuite qu'on devienne un peu plus craintif. Si on ajoute à cela l'âge qui s'aggrave, on obtient la combinaison parfaite de la paranoïa urbaine. Dans mon cas, il faut aussi compter avec mon imagination galopante.
Ça fait que... j'ai marché vite. J'ai fait un arrêt à un certain coin de rue avant d'entamer une partie de mon parcours dans le parc de l'école, là où ce n'est à peu près pas éclairé. J'ai pris mon courage à deux mains et j'ai foncé sans demander mon reste. Heureusement, ce soir, il n'y avait pas de flâneurs près des tables de pique-nique ou des balançoires. Ensuite j'ai retrouvé la lumière du boulevard. Et j'ai continué jusqu'à l'entrée d'un autre sentier qui s'enfonce dans le parc. J'ai littéralement stoppé pour évaluer la situation. Aucune lumière en vue. Le sentier semblait s'étirer à n'en plus finir. J'ai modifié mon parcours. Non, vraiment, je ne veux pas m'empêcher de faire certaines choses, comme marcher un peu tard le soir dans un quartier que je considère sécuritaire, mais j'ai décidé que je n'étais pas obligée de me mettre moi-même dans le pétrin. À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, dit-on. Je ne vois là aucun problème pour moi car à quoi bon les médailles de bravoure si on les reçoit à titre posthume?
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