jeudi 11 février 2010

Pingrerie

Je me sentais pas mal "cheap". C'était le deuxième mendiant que je croisais dans la rue ce midi et je n'avais pas ouvert mon portefeuille. Déjà, après avoir passé devant le premier, j'avais presque fait demi-tour pour lui donner quelques sous. Mais je m'étais dit que j'étais pressée, que je ne pouvais tout de même pas donner chaque fois que je rencontrais quelqu'un qui me sollicitait, bref j'avais très rapidement passé dans ma tête toutes les raisons qu'on se donne pour avoir bonne conscience.

J'avais un autre obstacle à ma "cheaperie". C'est que j'essaie toujours de regarder dans les yeux ces gens qui demandent la charité. Je ne veux surtout pas qu'ils pensent qu'ils sont invisibles. Qu'ils n'existent pas. Encore une fois juste pour garder ma bonne conscience. Mais c'est difficile de faire ça quand on ne donne rien. C'est bien beau un pauvre sourire ou un léger hochement de tête mais ça ne remplit pas un ventre creux.

Et, finalement, je me sentais "cheap" pas seulement parce que je ne répondais pas à leur demande. Non. C'était aussi parce que je passais devant eux avec un beau gros sac de plastique blanc qui contenait l'immense salade de poulet que je venais d'acheter pour mon lunch et les chocolats que j'étais allée chercher dans un magasin réputé pour fabriquer des friandises de grande qualité. J'avais donc dépensé tout près de 30 $ mais je ne pouvais pas disposer de 2 ou 3 $ pour des personnes moins chanceuses que moi??!! "Cheap!" "Cheap!" "Cheap!"

À la fin de ma journée de travail, je ne pensais évidemment déjà plus à tout ça. Mais la vie, elle, qui sait si bien être ironique et nous attendre au détour, n'avait rien oublié du tout. En descendant de l'autobus, je me dirige donc vers l'épicerie pour acheter mon souper. (Petite parenthèse : pour ceux qui croient que je ne cuisine plus, je dis : "Détrompez-vous!" C'est seulement une de ces journées où je me sens un peu lâche... et "cheap").

Alors, me voici en ligne à la caisse pour payer mes achats. Devant moi, un jeune gars avec un tatouage dans le cou. Je trouve ça original. Pendant que j'essaie de déchiffrer discrètement ce qui est écrit dans l'étoile bleue qui dépasse de sa chemise, la caissière lui annonce le montant qu'il doit verser. Il se met à compter frénétiquement les sous qu'il a dans sa main. Il lui remet les pièces mais la caissière lui apprend qu'il n'en n'a pas assez. Il cherche dans ses poches. Il dit à la caissière qu'il ne comprend pas. Qu'il a sans doute mal évalué le montant de sa petite commande. La caissière lui propose à ce moment d'aller au comptoir du service à la clientèle pour se faire rembourser quelques articles. Comme elle s'apprête à remplir un papier quelconque à cette fin, je me décide à intervenir et lui demande comment il doit. Je remets le montant en question au jeune gars qui me remercie et part avec son sac. La caissière me regarde et déclare : "Vous êtes gentille. C'est sûr que ça va vous être remis". Effectivement, ça venait de m'être remis!

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