mardi 4 décembre 2012

L'avocate du diable

Ne vous en faites pas, les photos promises s'en viennent. Pour ce qui est de la crèche, j'ai finalement réussi à installer le village de saison vendredi soir. Et le deuxième bébé chat d'Irma, qui est réapparu hier matin, semble avoir adopté lui aussi l'abri nucléaire construit par l'Homme. Tout est donc bien qui va bien pour le moment dans les festivités et les félins.

Mais ce n'est pas là la teneur de mon propos de ce soir. Non. J'avais simplement envie de partager avec vous un commentaire que j'ai entendu à quelques reprises dimanche pendant que le Fils, l'Homme, l'ami du Fils et moi nous faisions mouiller abondamment en passant la Guignolée de 11 h à 17 h. Je vous donne le contexte. Nous sommes dans une rue, disons de la classe moyenne, et nous frappons à la porte d'une maison sise dans ladite rue. Après avoir récité notre boniment de guignoleux en quête d'un geste charitable pour la bonne cause, nous recevons cette réponse à la fois décevante et étonnante : "Moi je n'ai rien à donner." Fort bien. Nous rebroussons chemin et reprenons notre bâton de pèlerin.

Et là, je confesse que je n'ai pas pu m'empêcher de me passer la réflexion suivante : "C'est sûr que tu n'as rien à donner car tu as tout". Je sais, je sais. Cela ne s'applique pas à toutes les situations. Je connais des gens bien nantis qui ont le coeur sur la main. Et je connais surtout des gens démunis qui sont capables de donner leur chemise. N'empêche. Arrêtez-vous deux minutes pour y penser un peu. N'est-ce pas souvent quand nous sommes gâtés par la vie que nous voulons tout garder de peur de perdre même quelques miettes?

Comprenez-moi bien. Je ne parle pas ici de donner de son nécessaire comme dans la parabole de la veuve. Je devise uniquement sur la possibilité pour chacun de partager de son superflu avec les autres. Et dans notre société de consommation, je demeure convaincue que le superflu ne manque pas. Pourtant, nous persistons, poussés sans doute par le réflexe de n'avoir jamais à manquer de rien, à tout garder même si notre tout représente aussi notre trop.

Je vais vous confier un secret. Le truc pour arriver à ouvrir notre coeur et nos mains, c'est de le faire plusieurs, plusieurs fois. Au début, on éprouve un pincement quand on sort un 2 $ qu'on aurait pu utiliser pour s'acheter un café. Mais que dire ensuite du serrement dans la poitrine quand on ose libeller un chèque d'un montant assez élevé pour qu'il représente un léger tantinet de notre nécessaire? On pense que ce n'est pas raisonnable. On se dit que d'autres personnes ont davantage les moyens de donner que nous. Et puis, il arrive une autre demande. On se prend à acheter des articles d'épicerie qui ne sont jamais offerts par les banques d'alimentation pour les offrir à un service de dépannage. On s'improvise "quêteux" pour un organisme de bienfaisance. On constate qu'on pourrait bien se départir de quelques vêtements, de meubles qui nous encombrent, d'ustensiles de cuisine qui prennent la poussière dans les armoires. On s'aperçoit qu'on peut toujours arriver à trouver un peu de temps pour aider les autres malgré nos multiples occupations. Et, un jour, finalement, on se rend compte qu'on reçoit beaucoup plus que l'on donne.

"Je vous le dis en vérité, cette pauvre veuve a donné plus qu'aucun de ceux qui ont mis dans le tronc; car tous ont mis de leur superflu, mais elle a mis de son nécessaire, tout ce qu'elle possédait, tout ce qu'elle avait pour vivre." Évangile selon Marc