jeudi 20 septembre 2012

Un tiens vaut mieux que trois tu l'auras

Bon, bien voilà, la preuve est faite : c'est pas si facile que ça d'attraper des petits chats! Mais avant de vous raconter mes dernières aventures de gardienne de parc Safari, permettez-moi d'abord de mettre au parfum les ceux zé celles qui ne suivent pas mes interventions sur Facebook (surtout pas de culpabilité, je suis moi-même encore une néophyte dans cette autre attrape de la Grande Toile). Voici donc le plus récent bilan concernant la population féline de la cour arrière : maman Irma a été stérilisée avec succès vendredi dernier, et Rémi a été adopté par mon ami coiffeur lundi soir et a depuis subi un changement de sexe pour devenir Capucine. Je crois que nous sommes maintenant tous au même diapason.

Ce soir, toujours dans le but de mettre en lieu sûr les trois bébés restants avant mon départ pour la Floride, je me suis présentée devant le trou de la clôture avec ma cage et un plat de nourriture. Je pensais pouvoir attraper les chouchous pour les confier ensuite à l'Homme qui aurait la noble mais ingrate mission de les conduire à la SPCA. C'était un plan ingénieux, du moins le croyais-je. Premier hic : aucun chat à l'horizon. "Ça commence bien, pas de coopération en vue", soliloquai-je. Que faire? Que faire?

J'installe quand même la nourriture dans la cage et je m'assois sur le petit banc que j'ai installé pour me permettre d'être à la hauteur de la situation depuis l'accouchement de ma chère Irma et aussi pour reposer mes pauvres genoux qui ne peuvent plus garder la position accroupie pendant une trop longue période. J'ai beau pratiquer une posture semblable au yoga, je n'ai pas la résistance nécessaire pour la maintenir le temps voulu pour apprivoiser mes redoutables fauves. Une fois assise, je m'empare d'une branche que je compte utiliser pour attirer mes proies. "Les bébés, les bébés, venez manger", que je leur déclame de ma voix la plus rassurante. Aucun réaction. Je répète plusieurs fois mon invitation en camouflant du mieux que je peux l'intention diabolique qu'elle cache sans obtenir de résultat probant. Après plusieurs minutes d'attente, un des bébés noirs, Amir je crois, se montre le bout du nez. Il manifeste un vif intérêt pour mon jouet improvisé et s'approche très lentement de la cage. Au bout d'un moment qui me semble interminable, il s'avance vers le piège attiré par le bol de nourriture. Je retiens mon souffle. Il est pratiquement à l'intérieur. Je dirige doucement ma main vers son derrière pour le pousser plus avant afin que je puisse fermer la porte. Je ne suis pas assez rapide. Il panique. Je tente de l'attraper. Il crache et me griffe. Je dois le laisser partir.

Fin du premier round. Bébé Amir : 1. L'amante des bêtes : 0.

Entre-temps, l'Homme est arrivé du travail prêt à accomplir sa mission. Il est pas mal découragé de constater que je n'ai pas réussi à accomplir même le début de la mienne. Après avoir écouté mes mésaventures et examiné mes blessures, il me suggère d'attacher une longue corde à la porte pour être capable de la fermer sans faire peur aux chats. Pendant que nous installons notre nouveau dispositif, maman Irma se pointe avec le reste de sa progéniture. J'éloigne mon banc pour surveiller l'entrée de la cage prête à tirer la corde au moment propice. Évidemment, c'est Irma qui pénètre dans le piège. Je sens que ce ne sera pas ce soir que je pourrai arriver à mes fins. En tout cas, je ne pourrai certainement pas attraper les trois bébés d'un seul coup. Je propose alors à l'Homme de prendre Grisou puisque celui-là, le pauvre, me fait confiance.

Je retourne près de la clôture en emportant cette fois tous les plats de nourriture. Je sais fort bien que lorsqu'ils mangent, les petits chats sont moins attentifs. C'est là que j'arrive à les caresser un peu. J'avais malheureusement raison puisque je réussis sans problème à prendre Grisou dans mes bras. Je le flatte doucement et, comme une hypocrite que je dois être, je le mets dans la cage. Et là, devant sa famille réunie, je l'enlève. Je déteste ça.

En emportant la cage vers l'auto, je parle une dernière fois à mon bébé pour tenter de le rassurer. Lorsqu'il se retrouve sur la banquette arrière, j'entrouvre la porte de la cage pour y glisser ma main. Je suis capable de le toucher et de le caresser. Il a peur mais il est brave. L'Homme m'a raconté qu'il n'a pas miaulé pendant tout le trajet. C'est seulement une fois rendu à la SPCA, lorsque la préposée a voulu le sortir de la cage, qu'il a protesté un peu. Je suis contente que la SPCA de l'Ouest du Québec ne pratique pas l'euthanasie. C'est pour cette raison que c'est toujours à cet organisme que je confie mes animaux. Je sais que mon bébé va avoir une deuxième chance.

lundi 17 septembre 2012

Lumineux lundis

Allez hop! J'utilise le pluriel car, de façon générale, mes lundis sont toujours lumineux depuis que je suis devenue la Marcheuse urbaine libre. Aujourd'hui, la température nous gâtait. C'était une magnifique journée d'automne : fraîche le matin mais radieuse en après-midi. J'avais prévu le coup en m'habillant avec des pelures. Après mon café du matin pris en compagnie d'une ex-collègue, je m'étais déjà débarrassée d'une première couche pour me rendre au cours de yoga.

OM... comme c'était bon encore une fois de faire bouger mon corps. Je pensais bien souffrir sur le tapis car mes nombreuses activités de bénévolat m'obligent parfois à faire beaucoup de surplace. Par conséquent, mes pauvres hanches et le bas de mon dos me rappellent trop souvent à mon goût que je n'ai plus vingt ans. Pas grave puisque je peux me dérouiller une fois par semaine! Et comme c'était revigorant également de me centrer sur les paroles remplies de sagesse de notre prof. Comme le faisait justement remarquer l'une des participantes à la sortie du cours : "Elle est vraiment bien, F., elle nous dit des phrases significatives tout au long de la pratique. Cela nous aide à rester dans le moment présent." J'aime notamment quand elle nous rappelle l'importance d'être à l'écoute de notre corps et de respecter nos limites, et aussi d'être indulgente envers notre nous-même. Il me reste idéalement à me discipliner pour faire un peu de yoga et de méditation à la maison. Je suis certaine que je peux arriver à trouver un moment pour me mettre au diapason de la zénitude.

Pour le lunch, j'ai rencontré une amie avec qui j'ai bavardé jusqu'en milieu d'après-midi. Voilà une autre richesse de la liberté retrouvée : le temps compte différemment. Comme les obligations professionnelles n'existent plus et que les devoirs familiaux sont réduits au minimum, rien ne m'empêche d'étirer mon plaisir et de prendre deux cafés à la fin du repas. C'est tellement agréable de voir le restaurant se vider et de savoir que je n'ai pas à emboîter le pas des travailleurs. Il n'y a pas de dossier urgent qui m'attend. Youpi!

Finalement, il était près de 15 h quand j'ai laissé mon amie. J'aurais pu prendre l'autobus à Hull, mais il faisait trop beau pour que je me prive du plaisir de marcher jusqu'à Ottawa. Ce que j'ai fait. Une fois rendue sur le pont Alexandra, j'ai été de nouveau éblouie par le paysage qui se découpait sur le bleu du ciel : les écluses, la bibliothèque du Parlement, le château Laurier, la pointe Nepean. Il y avait en plus une brise qui nous rafraîchissait juste ce qu'il faut. J'ai savouré pleinement.

Quand je suis arrivée au Marché By, j'ai croisé le musicien qui se tient habituellement devant les portes du magasin La Baie. Pour dire vrai, j'ai d'abord aperçu son chien qui était couché bien tranquillement à ses pieds. J'ai fouillé dans mon porte-monnaie pour donner quelques sous. Quand je me suis approchée, j'ai soudainement réalisé qu'il ne jouait pas. J'avais l'air un peu folle avec ma modeste obole devant quelqu'un qui ne tendait même pas la main. Dans son cas, le singulier s'impose avec encore plus de force puisqu'il a un bras seulement; l'autre, c'est un moignon. Il m'a regardée en riant un peu et m'a dit qu'il attendait qu'un ami lui apporte sa guitare. Comme je ne savais plus trop quoi faire, il a pris mon argent et m'a proposé simplement de lui faire l'accolade. Ce que j'ai fait avec grand plaisir.

Quand je suis revenue à la maison, Irma m'attendait sur le patio. Elle avait faim. Et sa progéniture aussi. J'en ai profité pour m'amuser avec les bébés. Rémi m'a encore fait tomber sous son charme. Il aime maintenant rester sur mes genoux pour se faire caresser. Il ne cherche même plus à se sauver. Des fois, je regrette d'aimer autant les chats. Et je regrette encore plus d'avoir la capacité de jouer au Petit Prince. À quoi ça sert d'apprivoiser des bêtes sauvages pour leur apprendre à vous faire juste assez confiance pour ensuite les abandonner? Je sais, je sais. La SPCA, ce n'est pas un sort aussi terrible que ça pour des bébés en quête d'un foyer. Mais Rémi? C'est la seule ombre au tableau de mon lumineux lundi.

mercredi 12 septembre 2012

Mon oeil!

Ces chats ne m'appartiennent pas. Ils ne sont pas à moi. Je les nourris seulement. Deux fois par jour. Et je joue avec eux. Toutes les fois que je le peux. Bon je soigne aussi le petit avec la ligne orangée sur le front. Rémi que je l'appelle. Il faut bien que je me transforme en vet maintenant que j'ai constaté l'état de son oeil. Je ne pourrais pas faire semblant que "Tout va très bien Madame la Marquise" quand je vois le pus couler. Faudrait que je sois drôlement sans coeur et, malheureusement pour mon portefeuille et ma sérénité, je ne le suis pas.

J'aimerais bien l'être par exemple. Cela me permettrait de vivre moins inquiète. D'être moins tourmentée pour toutes les bibittes auxquelles je m'attache. Tenez, ce soir, Rémi s'était encore transformé en pirate. Je suis devenue tellement découragée. Pourtant, ce matin, il allait mieux. En présentant leurs gamelles remplies de bouffe jamais pareille d'un repas à l'autre à mon troupeau félin, j'ai réussi à prendre Rémi pour lui administrer son traitement à l'acide borique. Il faisait tellement pitié. Il miaulait tout doucement pendant que j'essayais tant bien que mal de lui enlever la croûte de pus. Ouais. Je sais. C'est pas appétissant. Mais c'est ça qui arrive quand on est pas capable de se marcher sur le coeur. On fait des choses pas appétissantes.

En tout cas, même après le traitement, son oeil est resté fermé. Là, j'ai paniqué. Je ne veux pas que ce minet devienne aveugle à cause de moi. Oui. Parfaitement. À cause de moi. Parce que je sais qu'il a mal et que je ne fais pas tout ce que je pourrais faire pour le guérir. J'ai donc réappelé la clinique vétérinaire : "Oui, bonsoir, j'ai besoin d'une information. La dernière fois que j'ai appelé, il n'y avait aucun rendez-vous disponible avant deux semaines. Est-ce toujours le cas? Ah! vous pourriez voir Rémi le 21. C'est loin. Il a l'oeil fermé. Et moi j'ai l'oeil larmoyant. Nettoyer avec de l'acide borique, vous dites? Je le fais déjà. Lui mettre des gouttes ophtalmiques en plus? D'accord, j'essaie ça et je vous rappelle s'il se met à apprendre le braille."

C'est que je commence à trouver que ça me pèse cette responsabilité de gardienne de fauves. Ainsi, j'ai décidé de remettre aux calendes grecques la préparation de notre souper pour me rendre plutôt à la pharmacie acheter les gouttes pour le chat. Faut savoir établir ses priorités dans la vie. Parlez-en à l'Homme. Je l'exaspère au quotidien depuis que je suis devenue responsable d'un véritable zoo. Savez-vous que je dois compter au moins une demi-heure, matin et soir, pour nourrir les bêtes à griffes et à nageoires? Je lave des plats, je remplis des plats, je nettoie le filtre, je mets des produits dans l'étang et je jette des granules aux espiègles et à leurs petits. Oui. Encore des bébés. Tout se reproduit autour de moi. C'est vraiment ironique quand on pense que moi je n'ai jamais réussi à jouer mon rôle de reproductrice. Mais ça c'est une autre histoire. Pour le psy, peut-être. Pour un jour de pluie, en tout cas.

Alors me voilà trottinant en direction de la pharmacie. Je cherche les fameuses gouttes. Je ne les trouve pas sur les tablettes. Je m'informe au comptoir. J'apprends que c'est justement là qu'elles sont cachées. Derrière ledit comptoir. Je dois quand même attendre que l'on inscrive dans mon dossier que j'ai demandé des gouttes pour les yeux avant de pouvoir repartir. Finalement, je suis appelée par le pharmacien qui a une question pour moi : "Madame, vous voulez des gouttes pour les yeux mais, dans votre dossier, il est indiqué que vous êtes allergique au sulfa." Je l'ai stoppé illico : "Ne vous en faites pas pour moi, il ne m'arrivera rien. C'est pour mon chat." Il avait bien l'air un peu interloqué, voire perplexe, et ça ne s'est pas amélioré après qu'il a entendu mes explications emberlificotées sur le fait que je soigne un chaton qui ne m'appartient pas. Qu'importe. Je suis repartie avec les gouttes.

Je devais maintenant pourchasser Rémi. Vous savez, attraper un chat une fois pour lui administrer un quelconque traitement est considéré comme un exploit. L'attraper une deuxième fois pour lui mettre des gouttes dans un oeil relève du miracle. Heureusement, Rémi comprend son nom maintenant et, quand je l'appelle, il arrive presque toujours en courant pour jouer. Je vous l'ai dit et je le répète : il est adorable. En tout cas, voilà mon Rémi qui accoure comme prévu. En agitant une tige de graminée, je suis capable de m'en emparer assez facilement. Je passe d'abord une compresse chaude sur son oeil fermé. Il a l'air d'apprécier. Il ne proteste pas trop. J'arrive même à baisser sa paupière du bas pour lui mettre les gouttes. Là, il n'est pas content. J'essaie bien de le retenir encore un peu pour qu'il ne se gratte pas mais c'est peine perdue. Je dois le laisser partir si je ne veux pas être lacérée vivante. Tout va bien cependant. Il se précipite derechef dans les hostas pour sauter sur ses frères et soeurs et se lancer dans une lutte à finir.

Quand je suis retournée un peu plus tard dans "l'enclos" pour examiner mon patient, j'ai pu constater avec soulagement que Rémi avait l'oeil ouvert. Et le bon.

jeudi 6 septembre 2012

Le Petit Prince... encore lui

Eh! oui, semble bien que je doive vraiment devenir responsable de ma chère Irma, mon renard à moi. Et pas seulement d'elle, mais aussi de ses quatre bébés que j'ai finalement décidé de baptiser Amir, Pauline, Rémi et... Grisou. Vous sentez là une influence électorale. Votre odorat ne vous trompe pas. Je ne pouvais quand même pas baigner des centaines d'heures dans la fièvre démocratique sans que cela n'influence un peu mes choix.

Alors, que je vous parle tout d'abord de Rémi. C'est le bébé qui ressemble le plus à sa maman avec, en plus, une petite ligne orange sur le front. Il est absolument adorable. C'est le premier que j'ai réussi à flatter et à prendre par la suite. Fort heureusement d'ailleurs car Rémi a un oeil infecté. J'étais en complète panique quand je me suis aperçue un beau matin qu'il s'était transformé en cyclope pendant la nuit, sauf que son unique oeil ouvert n'était pas en plein milieu du front. J'avais envie de pleurer. Je me demandais vraiment ce que j'allais faire pour soigner mon éclopé que je n'avais réussi à attraper qu'une seule et unique fois. Et comment allais-je me transformer en Docteur Dolittle sans le diplôme ni la pharmacopée? Je me suis alors rappelée que maman soignait les orgelets de la soeur du Milieu avec une solution d'acide borique. Ne voulant quand même pas prendre le risque d'empirer la situation et d'être obligée de munir Rémi d'une canne blanche, j'ai fait quelques recherches sur Internet.

Les premiers résultats obtenus m'ont fait paniquer encore davantage. Il était question d'infections pouvant rapidement dégénérer et entraîner la cécité, surtout chez un chaton. Doutant de pouvoir faire face adéquatement à la situation, je saute sur le téléphone pour joindre le vet. J'apprends qu'il n'y a aucun rendez-vous disponible avant deux semaines. Par contre, je peux me présenter en urgence moyennant un déboursé de 80 $! Je ne suis pas grippe-sous de nature mais là j'ai eu comme l'ombre d'une hésitation. Après tout, la trâlée d'Irma ne m'appartient pas... ou si peu. Avant de me résoudre à vider mon portefeuille, j'ai décidé de retourner une autre fois sur la Toile et de raffiner ma recherche. Je suis ainsi tombée sur la page d'un amateur de tortues qui racontait comment, avec l'approbation d'un vet, il avait réussi à guérir les yeux de sa tortue à l'aide de l'acide borique et d'un onguent antibiotique. Après avoir consulté la soeur Psy, je me suis limitée à la potion de ma mère. Je suis heureuse de signaler que l'oeil de Rémi prend du mieux. Le plus difficile consiste à administrer le traitement à un petit minet qui ne me fait pas totalement confiance. Mes mains portent d'ailleurs les traces des griffes du chat-lion paniqué!

Et je crois que je pourrai mettre un holà définitif au cycle de fertilité de mon Irma d'ici mon départ pour la Floride. Vendredi prochain, c'est le jour S pour stérilisation. En attendant, je dois familiariser la future patiente avec la cage dans laquelle je vais la transporter. J'ai donc sorti l'objet du sous-sol ce soir pour l'installer près de mon troupeau félin. Évidemment, ce n'est pas Irma qui s'est intéressée au nouveau meuble de jardin. Non, ce sont plutôt les bébés qui se sont empressés de l'examiner. À un moment donné, Amir était couché sur le dessus pendant que Pauline et Grisou essayaient de grimper pour le rejoindre. Quant à Rémi, il a poussé l'audace jusqu'à pénétrer à l'intérieur tout intrigué qu'il était par la serviette duveteuse qui en recouvre le fond. Je suis presque certaine que je vais éventuellement tous les retrouver en-dedans en train de roupillonner.

Ma mission de Petit Prince n'est cependant pas terminée. Il me reste encore à confier les bébés à des gens responsables et à espérer qu'Irma voudra être mon "chat de dehors". À bien y réfléchir, je crois que j'aurais préféré arrosé la Rose.