samedi 20 janvier 2024

C'est assez!


Comme je le fais depuis quelques années déjà, j'ai feuilleté des magazines pour découvrir les mots ou les images qui me parlent en ce début de 2024. Je les utilise ensuite pour faire un collage en lieu et place des traditionnelles résolutions. C'est un truc de psy et je trouve que ça fonctionne super bien. C'est très révélateur en fait. Par exemple, j'ai immédiatement découpé C'est assez! Deux mots et un point d'exclamation. Ils me collent à la peau. Ils me hantent la tête. Pourquoi? Oui, assez de quoi au juste? Cela me turlupine depuis plus d'une semaine. 

Autour de ces deux mots que j'ai collés en plein milieu de mon carton rose, j'ai ajouté deux phrases : Je me renforce de l'intérieur et Je me mets sur pause. Si je comprends bien, je travaille à m'améliorer mais... en relaxant. On va dire plutôt en prenant soin de moi. En y allant mollo. Faut dire que ça prend du temps pour se construire des bases solides, pour se sentir en confiance, pour être forte dans l'adversité, pour savoir se respecter et prendre des décisions en fonction de ses valeurs. Ouais, des valeurs qui, à raison, ne sont pas nécessairement et j'ajouterais rarement celles des autres. Nos valeurs nous sont propres. Des fois, elles rejoignent l'air du temps mais vraiment pas toujours. Alors, faut se tenir debout, expliquer des fois, se justifier (je déteste), pleurer (je déteste encore plus) et se mettre sur pause pour prendre un pas de recul et réfléchir.

Sur mon carton, il y a aussi des aînés qui se tiennent par les épaules et des mains empilées les unes sur les autres en signe de solidarité et de partage. Les aînés regardent en avant, ils sont debout, tournés vers ce qui s'en vient. Parce que je fais partie du lot maintenant, je suis davantage à l'écoute de ce besoin que je ressens plus viscéralement d'être unis pour affronter le "bel âge", expression souverainement détestée par maman qui ne voyait pas ce qu'il y avait de beau à tomber en décrépitude. J'avoue que je partage souvent son point de vue. Même quand la santé est au rendez-vous, il y a quand même toujours des morceaux qui grincent. D'où l'importance de fréquenter régulièrement, mais pas exclusivement, des modèles de notre âge. En effet, cela permet notamment de vérifier la véracité du vieil adage qui prétend que quand on se compare, on se console! Je rigole un peu là. Pour dire les choses comme elles sont, cela me rassure et me fait un bien immense d'échanger avec des gens qui ont des repères semblables aux miens. Tout d'un coup, je ne suis plus cette vieille chose qui ne comprend rien à l'intelligence artificielle et je deviens une rebelle qui persiste et signe à lire un journal en papier!! Voilà que je ne suis plus une mère qui n'arrive pas à se remettre du nid vide mais plutôt une femme qui a aimé de tout son coeur et qui se languit de sa progéniture. Ben oui, je suis comprise. Je me retrouve avec des gens qui partagent le même langage que moi. Maudit que c'est trippant ce merveilleux sentiment de ne plus être considérée juste comme une fatigante mais comme une personne qui a encore des projets et qui rêve toujours d'un monde plus juste où règnent la solidarité, le partage, la douceur et la joie.

Parlant de monde, à la gauche de mon carton, j'ai collé une image de notre pauvre vieille Terre entourée de ruines avec au-dessus le mot Survivre. Voilà tout un défi pour une époque pas joyeuse du tout. J'ai un malaise persistant, né pendant la pandémie, d'assister à la fin du monde. Des fois je me sens presque soulagée à la pensée que je vais mourir avant de voir notre Terre bafouée, défigurée, détruite à tout jamais. Et puis, je suis fatiguée d'entendre les mêmes discours, les cassettes répétées à l'infini, les fausses promesses, les semblants de vérités, les explications boiteuses, les excuses pas sincères du tout et je n'en peux plus d'être prise littéralement pour une conne. Comme si je n'avais pas déjà entendu tout ça des milliers de fois en soixante-huit ans de vie. J'attends encore des résultats. Dans le fond, pourquoi vouloir à tout prix survivre à ça? Je ne sais même plus pourquoi je m'entête à me tenir au courant des actualités. J'espère vainement voir se réaliser au moins un projet, être témoin d'au moins une chose qui fonctionne bien. Hélas, cela semble peine perdue.

Alors, il devient plus clair mon cri de ras-le-bol. C'est assez d'attendre d'être acceptée pour ce que je suis. Et c'est assez d'attendre que les choses s'améliorent dans notre société égocentrique. Je me souhaite donc, pour 2024, de m'aimer inconditionnellement (qui m'aime me suive) et de continuer à prendre soin des autres. Du mieux que je peux. Tout ça en poussant, mais en poussant égal.