mardi 31 janvier 2012

Le mirage de l'idéal

Vous connaissez ma propension à courir les cliniques médicales. J'espionnais pas à pas depuis une semaine le développement d'une infection urinaire. Finalement, à 7 h dimanche, mes soupçons s'avèrent. J'urine le sang. Je ne fais donc ni une ni deux, et je me précipite pour obtenir le verdict d'un toubib.

La clinique ouvre ses portes à 9 h. J'y suis à 8 h 40. Je suis la dix-huitième patiente à s'inscrire. Je me désespère. Je ne m'imagine pas en train d'attendre des heures sur une chaise droite. Je retourne donc à la maison prendre une pause et reviens vers 11 h 45. Le docteur a déjà vu 28 patients! "Ça alors," que je me dis, "c'est un vite du stéthoscope celui-là!" Heureusement pour moi, la gentille secrétaire avait mis mon dossier en-dessous de la pile ce qui fait que je pouvais toujours obtenir l'avis médical recherché. Je constate d'ailleurs, après avoir obtenu cette information, la présence d'une affichette sur le comptoir de la réception qui indique que le quota de patients pouvant obtenir audience cette journée-là a été atteint et que la clinique reprendra ses activités seulement le lendemain matin. "Ouf," soupire-je, "je l'ai échappé belle," et je retourne attendre mon tour.

Pendant que je tourne les pages de mon journal, je vois entrer une jeune maman avec ses deux enfants. "Allez m'attendre là-bas," qu'elle leur demande en désignant la salle d'attente. Ils sont mignons. Un petit garçon et sa grande soeur. Ils s'installent non loin de moi et déballent les jouets qu'ils se sont apportés pour passer le temps. Inquiète à cause de l'affichette dont je vous parlais plus haut, je ne peux m'empêcher de jeter un oeil en direction de la maman qui, je le constate bien, tente vainement de plaider sa cause pour obtenir le droit de voir le médecin. Peine perdue. Elle revient bredouille vers ses enfants et, les larmes aux yeux, elle leur annonce qu'ils doivent quitter la clinique. "Pourquoi tu es triste maman?" demande d'abord le petit garçon. "Oui, maman, pourquoi tu pleures?" ajoute la grande soeur. La maman les prend contre elle pour les rassurer en leur affirmant que tout va bien aller, et elle se dirige vers la sortie. J'ai évidemment le coeur retourné. Je me dis que voilà ce qu'est devenu notre système de santé. Un endroit où il n'y a plus ni compassion, ni empathie. Bref, je suis restée outrée jusqu'à ce que j'embarque dans le soulier de l'autre.

Quand j'entre enfin dans le cabinet du médecin, je m'empresse de lui déclarer que je suis la dernière patiente de la journée, histoire de l'encourager. Il me regarde alors avec un pauvre sourire et me dit simplement : " Je crois que le ministre devrait m'envoyer une lettre de félicitations." "Vous avez raison. Vous avez eu une grosse journée," que je m'empresse d'ajouter pour le garder de mon bord même si je trouve qu'il y va un peu fort surtout quand je repense à la scène à laquelle je viens tout juste d'assister. "Effectivement," qu'il me répond, "c'était la septième en ligne!" Je comprends mieux maintenant son teint pâle et ses traits tirés. J'avoue aussi l'avoir côtoyé sous des jours plus joyeux. Sommes-nous en train de tous les perdre au combat? Voyez ci-dessous un extrait de la lettre ouverte envoyée aujourd'hui par le Dr Guillaume Langlois, médecin du village de Sainte-Gertrude, dans différents journaux :

Lorsque les gens de Sainte-Gertrude, apprenant que j'habitais dans leur village, sont venus me rencontrer pour me demander de travailler chez eux, je n'avais aucune idée de ce qui m'attendait.

On m'avait promis une équipe, forte, unie, prête à tout pour sauver sa communauté... On m'a promis la lune, un monde de rêves, un rempart contre le vent de folie de notre système de santé. Un vent qui souffle l'espoir des jeunes médecins comme une chandelle.

J'y ai entrevu des possibilités infinies... J'y ai surtout vu le moyen de me consacrer à ce que je sais faire de mieux : soigner, traiter, guérir, accompagner.

... Pendant trois ans et demi, j'ai été à la tête d'une clinique de plus de 3 000 patients. À bout de bras, j'ai supporté leurs joies, leurs peines. Avec eux, j'ai côtoyé la mort, la souffrance, le désespoir...

À 31 ans, j'ai l'impression d'avoir vécu plus que ma propre vie.

Malheureusement, pendant tout ce temps, je n'ai pu qu'entrevoir, au loin, le mirage de ma clinique idéale. La surcharge de travail qui devait être temporaire, une simple crise de courte durée, s'est prolongée, éternisée. L'équipe unie qui a oeuvré à m'attirer a éclaté. Les projets ont rapidement stagné, se sont figés. J'ai dû passer des milliers d'heures à gérer, négocier, rencontrer, convaincre, superviser, encourager, réconcilier... alors que mon seul désir était de soigner.

C'est donc l'âme et le coeur usé que j'écris ces mots... J'ai beau hurler, crier, il n'y a plus rien à espérer, les dés sont depuis trop longtemps jetés.


Soignants et soignés, il semble bien que nous soyons malheureusement tous embarqués dans le même bateau qui prend l'eau!

jeudi 26 janvier 2012

La tentation

"Tu n'as pas encore écrit ton livre?", m'a lancé la prêtresse vaudou en sortant ses aiguilles. "Non," que je lui ai répondu en m'étendant sur la table d'opérations, "mais je continue à publier des messages sur mon blog." "Je n'ai pas d'intérêt pour cette forme d'expression", me déclare-t-elle avec sa franchise habituelle. "C'est un livre que tu devrais écrire," m'affirme-t-elle péremptoirement en m'enfonçant une dernière aiguille en plein milieu du front.

Transformée en pelote à épingles pour la prochaine demi-heure, j'ai fermé les yeux pour chercher la zénitude. Au lieu de ça, je n'ai cessé de retourner dans ma tête les paroles échangées avec la médium des âmes. C'est que ce n'est pas la première fois que cette experte dans l'art de planter des objets contondants dans des corps consentants me passe cette remarque. Je ne sais pas pourquoi mais elle est persuadée que j'ai une histoire à raconter. Pire encore. Elle croit que j'ai quelque chose d'intéressant à dire. S'il n'y avait qu'elle. Le papa de l'Amie yogini a fait un peu le même commentaire en découvrant mon blog l'autre jour. Selon lui, il se lit comme un roman. C'est vrai. Avec les années, le blog est devenu un petit monde où gravitent des personnages et des animaux qui vont et viennent au gré de mes aventures et mésaventures. De là à en faire un livre, c'est un clic de clavier que je n'arrive pas à exécuter.

Par ailleurs, vous dire que je n'ai jamais songé à me lancer dans un projet d'écriture serait vous mentir effrontément. J'ai déjà établi notamment que ce ne serait pas une saga. Le millier de pages, très peu pour moi. J'ai toujours préféré les histoires courtes qui vont droit au but. Ainsi, je ne m'imagine pas assise dans une bibliothèque poussiéreuse en train d'effectuer des recherches exhaustives sur les blasons héraldiques ou tentant de construire un arbre généalogique aux ramifications parfois douteuses afin d'expliquer les relations tordues qu'entretiennent les membres d'une même famille.

En fait, je suis très peu attirée par l'idée d'écrire de la fiction. J'ai déjà essayé de penser à une histoire que je pourrais travailler pour en tirer un livre mais j'avais l'imagination bloquée en partant, comme si j'étais tout à fait incapable d'inventer quoi que ce soit. Si je décidais de suivre ce courant, c'est sûr que je partirais d'un fait vécu pour ensuite extrapoler. Ce pourrait être une possibilité. J'ai également songé à écrire des nouvelles. Mais je trouve qu'il faut être particulièrement doué pour ce genre littéraire. Faire entrer rapidement le lecteur dans un monde pour l'amener tout aussi rapidement à une chute, la plupart du temps inattendue, c'est tout un art.

Je reviens donc à mon blog. Et à l'observation du monde qui m'entoure. C'est ça qui m'intéresse. Tous les jours, la vie m'offre la chance inouïe d'être un témoin privilégié, de me situer aux premières loges de l'histoire la plus passionnante qui soit. Du fait le plus anodin à la leçon de vie, je suis constamment émerveillée ou attendrie. Si je cédais donc une bonne fois à la tentation, c'est là que je commencerais. Au début. Il était une fois la Terre des hommes et des femmes...

mardi 24 janvier 2012

Qu'est-ce qu'on mange?

Imaginons un instant que, tout comme les protagonistes de l'excellente série Naufragés des villes, vous vous retrouviez itinérant ou démuni sans autre ressource que votre chèque de BS. Il vous faudra bien à un moment donné trouver de la bouffe pour vous rendre à la fin du mois et mettre quelque chose de plus dans votre frigo qu'une petite ampoule qui s'allume et qui s'éteint quand vous ouvrez la porte. En fait, vous aimeriez probablement qu'elle reste éteinte la foutue ampoule étant donné qu'il n'y a rien à voir. C'est là que que vous pourriez décider de faire appel à un service de dépannage alimentaire.

Comme cela tombe bien. C'est justement aujourd'hui votre rendez-vous mensuel pour cueillir les deux sacs d'épicerie qui vous permettront de tenir le coup. Je ne peux pas me mettre à votre place. J'imagine cependant que j'aurais hâte de savoir ce que je vais manger dans les prochains jours. Mais j'erre peut-être complètement à côté de la "track" comme on dit. Si vous venez régulièrement, vous êtes sans doute immunisé contre les fausses joies. Et pour cause. Les denrées qui vous sont remises sont de moins en moins variées. Pas d'oeufs. Rarement de la viande. Pas souvent de légumes ou de fruits frais. Le contenu des sacs a suivi la courbe descendante de l'économie.

Alors, qu'avais-je à vous offrir cet après-midi? Les sempiternelles boîtes de conserve de tout acabit. Du lait et du pain congelés depuis quelque temps déjà pour préserver leur fraîcheur. Un petit paquet de viande hachée. Des nouilles et des grignotines. Des jus de fruits. De la vinaigrette avec, cette fois, de la salade et des tomates pour l'accompagner. C'est certain qu'il vous faudra manger la laitue Boston le plus tôt possible car elle est légèrement fanée la pauvre. Par contre, les tomates ne sont pas plus rouges qu'il ne faut. Si vous attendez leur mûrissement, vous devrez vous contenter de simples feuilles vertes dans votre bol. Le brocoli, qui nous a été livré sur de la glace, a mal supporté le transport. Sa tige est encore ferme. Sa tête, toutefois, à défaut de cheveux blancs, a pris une teinte jaunâtre qui ferait en sorte que moi je la plongerais dans un potage bien que je n'ose m'aventurer à en prédire le goût.

Pour le dessert, je vous conseille d'éplucher au plus vite les clémentines. Nous les avons triées pour vous offrir les meilleures. Malgré tout, nous avons dû constater que, tout comme leur compère le brocoli, elles n'avaient pas particulièrement apprécié le froid de l'entrepôt ou du camion. Cela leur a ramolli le caractère et crevassé l'épiderme. Je vous le dis, certaines n'étaient pas belles à voir.

Finalement, j'aurais peut-être dû vous donner une des bouteilles au contenu vert destinée à préparer un cocktail Martini aux pommes qui nous ont été livrées avec notre commande. Je cherche encore où cette chose figure dans le Guide alimentaire canadien.

«Sans l’indignation, on s’habitue à faire le bien à la place de la justice sociale.» L’abbé Pierre

dimanche 22 janvier 2012

Les bons débarras

Comment avons-nous passé l'après-midi l'Homme et moi? Non. Ce n'est pas ce que vous croyez. Je devrais peut-être davantage vous demander où nous étions. Non. Ce n'est pas ça non plus. Nous nous trouvions tout simplement dans la cave en train de de faire du ménage en prévision de la vente-débarras de la Soupière la fin de semaine prochaine.

Eh! oui, c'est le plus récent moyen déniché par cet organisme pour amasser des fonds. Trouvant l'occasion parfaite pour mettre de l'ordre dans le sous-sol, j'ai dit à l'Homme : "As-tu des plans pour la journée?" Malheureusement pour lui, il a répondu par la négative. Moi j'avais des plans. Je n'en pouvais plus notamment de voir deux des tables utilisées par le Fils dans ses belles années pour organiser des rassemblements LAN nous empêcher d'atteindre les étagères situées le long du mur. Nous nous sommes donc mis à l'ouvrage en écoutant les choix musicaux retenus par l'Homme pour nous encourager.

Premier CD : Harmonium. La cinquième saison me semblait toute indiquée pour faire le ménage dans de très vieilles affaires, dont des boîtes de livres datant de nos tendres enfances. Trente ans de poussières, d'insectes "papiervores" et de moisissures diverses et autres n'ont pas aidé à la préservation des Bob Morane, Nick Jordan, Vicki et Sylvie qui ont bercé notre adolescence. Nous les conservions pour nos petits-enfants. La belle affaire! Comme l'Homme le faisait justement remarquer à son frère en lui annonçant le dépôt de la cargaison dans le bac de recyclage : "De toute façon, il faudrait s'équiper d'un masque pour lire un de ces bouquins." L'humidité avait fait son oeuvre et, pour une fois, la nostalgie ne nous a pas empêchés de faire notre boulot.

Deuxième CD : Jean Leloup. Parfait pour s'attaquer aux bagages inutiles. Pour des gens qui n'ont pas voyagé tant que ça, du moins à l'extérieur du pays, nous possédions un nombre assez imposant de valises. L'une d'entre elles remontait même à mes années d'université. Elle n'était pas si mal conservée n'eut été des crocs de Mimi qui avaient grignoté la courroie. Elle est allée rejoindre Bob pour ses nouvelles aventures autour du monde!

Troisième CD : Damien Robitaille. Idéale la bonne humeur de ce chanteur que j'adore pour retourner, je l'espère pour la dernière fois, dans les boîtes ramenées du bureau. Trente-quatre années de loyaux services sont passées elles aussi au recyclage : lexiques et fiches du Bureau de la traduction datant des années 80, formulaires de demandes de congés remontant pratiquement aux débuts de ma carrière et évaluations de rendement dithyrambiques n'ayant pas évité ma lente descente dans l'enfer de l'oubli. Sentez-vous poindre ici comme une légère frustration? Vous êtes perspicace. Je vous lance donc ce message à vous tous qui prenez à coeur votre travail et qui parfois croyez à tort à votre indispensabilité : "Vous allez partir un jour et personne ne se souviendra même de votre nom après quelques mois." Vous ne me croyez pas? C'est l'Ami qui m'a rapporté la chose dans le cas d'une collègue à la retraite depuis peu. C'est comme si elle n'avait jamais existé. Même chose pour moi. Pourquoi, oui dites-moi pourquoi, j'aurais voulu au moins savoir que quelqu'un quelque part regrette ma plume? Je sais. Je dois me faire soigner. L'important, c'est la satisfaction que j'éprouve à avoir été professionnelle jusqu'à la fin. Le reste, c'est du vent. Ou de la vanité. Ou je ne sais trop quoi. Et puis, c'est assez. La page est tournée. Les papiers ont été jetés. Je passe à un autre CD.

Quatrième CD : Elton John. B-B-B-Bennie and the Jets, chantait Elton pendant que nous examinions, découragés, les innombrables et incalculables pièces informatiques qui se trouvent éparpillées un peu partout dans notre cave Apple à nous. Non seulement nous faut-il attendre le Fils pour effectuer un tri entre ce qui est encore au goût du jour et ce qui est périmé depuis la semaine dernière, mais nous devons aussi tenir compte de l'heure, oui je dis bien de l'heure, à laquelle l'Écocentre sera ouvert pour accueillir notre don! Encore une fois, vous pensez que j'exagère. Juste pour vous prouver que mon exaspération a une raison, je viens de visiter le site Web de la Ville pour y apprendre que l'Écocentre est... actuellement fermé. Oui. Oui. Il rouvrira ses portes le 5 avril prochain. C'est à prendre ou à attendre. Quoi faire d'autre lorsqu'on est écologiquement programmé?

Le ménage n'a qu'un temps. Et, dans mon cas, il est toujours assez court. Disons qu'après quatre CD, j'en avais assez. J'ai donc troqué le plumeau pour les espadrilles et je suis sortie vite dehors pour aller respirer un grand coup. J'en ai profité pour me débarrasser des regrets et des souvenirs qui me collaient encore à la peau même si je sais fort bien que tout ne peut pas être vendu ou recyclé.

samedi 21 janvier 2012

À l'abordage!

Je vous vois penser. Vous croyez que je vais ergoter sur le naufrage du Concordia. Pas vraiment. Je ne peux cependant m'empêcher de m'exclamer : "Où est le tonitruant capitaine Haddock quand on en a besoin? Mille milliards de mille sabords, ce n'est pas lui qui aurait eu la brillante idée de se rapprocher aussi dangereusement des côtes." Certes, le brave homme sombrait régulièrement dans la dive-bouteille. Par contre, digne de son ancêtre l'impeccable chevalier de Hadoque, il n'aurait jamais abandonné son navire. Et, à ce que je sache, il n'a jamais exécuté de manoeuvres douteuses lorsqu'il a pris le gouvernail pour conduire Tintin à bon port. En tout cas, pour moi qui n'aime déjà pas l'eau, cet accident n'a rien pour me rassurer. Je persiste et je signe donc, et continue de préférer, et de loin, le solide plancher des vaches.

D'ailleurs, chers amateurs de croisières qui s'amusent, savez-vous que chaque année on déplore la disparition de passagers embarqués un jour pour une croisière de rêve mais jamais redescendus du paquebot maléfique? C'est l'Ami qui me faisait part l'autre matin de cette aberrante réalité. Imaginez comme c'est facile de se débarrasser d'un corps en haute mer! Vous séduisez par exemple une jeune fille innocente mais riche et, plouf, un beau soir au clair de lune vous la passez par-dessus le bastingage. Ni vu, ni connu. Pas de cadavre, pas de crime. C'est la croisière fatale. Et que dire des procédures juridiques compliquées qui en découlent. Aucun gouvernement ne veut prendre la responsabilité de l'enquête. De toute façon, comment prouver dans quelles eaux a été commise l'horrible chose? On se renvoie la balle et on s'en lave les mains. Dois-je ajouter que, dans ce cas, l'eau destinée à purifier l'inaction ne manque pas!

Mais je m'éloigne de mon propos. Voilà que j'ai levé l'ancre sans m'en rendre compte. Je reste toutefois dans le domaine maritime pour vous apprendre que j'ai été victime d'une félonie virtuelle. Oui, mon compte de messagerie électronique a été piraté, ce qui a entraîné l'envoi en mon nom de courriels sibyllins à toutes les personnes figurant dans mon carnet d'adresses. Comme si ce n'était pas suffisant, les messages étaient dans la langue de Shakespeare! Bon, pour beaucoup de mes amis, cela a eu l'avantage de leur mettre la puce à l'oreille. La marcheuse urbaine serait-elle devenue une vire-capot? Ne craignez rien. Ma fibre nationaliste est demeurée intacte.

Je sais que cette attaque n'est pas de ma faute. Surtout que le Fils m'a appris que nous étions des centaines à avoir été victimes de cet affront. J'ai quand même éprouvé un embarras certain, voire une forme de honte, lorsque j'ai constaté l'ampleur des dégâts. Il s'agissait évidemment de messages publicitaires, entre autres sur le Viagra. L'Homme est d'ailleurs resté hébété quand il a pris connaissance de la missive que je lui faisais ainsi parvenir!

Seul point positif de ce fléau : des amis dont je n'avais pas eu de nouvelles depuis fort longtemps se sont manifestés. Je vais justement dîner avec l'un d'eux vendredi prochain. C'est le moment ou jamais de ressortir le vieux proverbe qui affirme qu'à quelque chose, malheur est bon, et de poursuivre le voyage virtuel sur des eaux, je l'espère, plus sécuritaires.
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Notes pédestres de vendredi : Je voulais écrire ce message hier soir mais, quand je suis revenue de la représentation du spectacle Le boss est mort, j'étais trop fatiguée pour même lire une ligne de mon roman policier dont je n'arrive pas à voir la fin. J'ai un crime en suspens. C'est horrible.

Alors, j'ai marché hier après-midi sous un soleil magnifique et un froid presque sibérien qui ressemblait étrangement à celui expérimenté avec la soeur Psy aux Marais du Nord. J'ai donc pensé à ma compagne marcheuse et aux bons moments que nous avions passés ensemble. Cette fois, j'avais les écouteurs. Je voulais me brancher sur RadioCan mais, en ouvrant mon mp3, c'est Trivium qui hurlait. Je n'ai pas résisté à l'appel du métal et j'ai parcouru plus rapidement mes trottoirs chéris. J'ai fait un seul arrêt pour me tourner vers le soleil et ouvrir tout grand mes bras, un geste que nous faisons souvent au yoga pour ouvrir notre cage thoracique et, je crois aussi, pour nous ouvrir au monde. L'Amie yogini a raison : le yoga, c'est pas juste des postures!

mercredi 18 janvier 2012

Quand les planètes s'alignent

Bonne journée pour les avides lecteurs. La Marcheuse urbaine libre a également pris la plume!

Bon. J'ai d'abord été appelée la mère Teresa de la rue Notre-Dame par nul autre que mon nouveau jeune patron. Eh! oui, j'ai obtenu une promotion à la Soupière. Je m'occupe maintenant des dépannages alimentaires d'urgence deux jours par semaine. Comme je travaille aussi au Service de dépannage de la paroisse où je continue de cuisiner de la bouffe, j'ai hérité de cette appellation ma foi fort sanctifiante.

Comme si ce n'était pas assez. En allant me faire épiler les sourcils pour ne pas devenir une femme retraitée avec front broussailleux, j'ai reçu ce message direct et sans équivoque de la tortionnaire du poil après lui avoir présenté un compte rendu de mes plus récents exploits comme bénévole : "Tu es investie d'une mission."

Enfin, voilà l'Amie yogini qui s'y met elle aussi en m'envoyant un courriel inspiré et inspirant. Lisez plutôt : "J'ai pensé, après notre rencontre, à Gandhi et à mère Teresa, qui étaient de grands exemples du karma yoga, le yoga du service désintéressé à la société. Il me semble que tu as fait un grand bout de chemin dans cette voie. Et oui, le yoga, c'est pas juste des postures!"

Je ne sais pas si j'ai l'âme missionnaire. Il y a une chose que je sais, cependant, c'est que j'ai l'âme légère, heureuse et entièrement satisfaite toutes les fois où je bénévole, particulièrement à la Soupière parce que j'y passe plus de temps. Comment vous expliquer que les actions réalisées s'étendent bien au-delà du muffin enveloppé, du linge plié, du café servi ou du nettoyage d'un bureau? Oui, ces tâches sont utiles et elles doivent être faites pour que les bénéficiaires puissent recevoir les services dont ils ont besoin. Mais pour moi, il y a plus. Beaucoup plus.

N'allez pas croire que je suis meilleure qu'une autre. Pas du tout. C'est juste que j'aime tellement les gens. Je devrais peut-être me mettre des barrières pour me protéger mais j'en suis incapable. J'adore me laisser toucher par les rencontres extraordinaires que je fais toutes les fois que je bénévole, et ce, tant du côté des merveilleuses personnes aidantes que des fantastiques personnes aidées. Me semble que c'est ça la communion avec les autres.

Tenez, par exemple, en quelques jours seulement, j'ai partagé l'inquiétude de quelqu'un dont la mère est très malade et la peine d'un autre qui accompagne un proche en fin de vie. J'ai écouté une très jeune mère me parler de l'abandon qu'elle venait de vivre. Mais j'ai aussi joint ma voix à celle des autres dans la grande salle à manger pour souhaiter un heureux anniversaire à un bénéficiaire tout content que l'on ait pensé à lui. J'ai surtout ri très souvent en taquinant ou en me faisant taquiner. Je crois aussi que j'ai pris trop de cafés. Pas grave. Le plus important, c'est que j'ai donné et reçu une tonne d'amour. Comme mission, je ne peux pas demander mieux!

samedi 14 janvier 2012

Vivifiant, l'air était!

Imaginez un crouche-crouche plus croustillant, suivi d'un crisp-crisp plus mordant. Ce sont les onomatopées de mes pas sur les trottoirs cet après-midi. Loin étaient les sentiers de neige de ma semaine de vacances avec la soeur Psy, mais aussi mordant était le froid. C'est drôle. Voilà que je parle comme le Yoda de la Guerre des étoiles depuis que je suis revenue de ma sortie pédestre.

C'est que sans même prendre la peine d'évaluer la température ressentie, j'ai en effet décidé de profiter du beau soleil de la fin de la journée pour m'aérer un peu le cerveau. Remarquez que je suis en train de me demander si je ne l'ai peut-être pas gelé ce faisant. Tant pis. Le jeu en valait la chandelle ou, dans le cas qui nous occupe, le Plan Nord en valait l'engelure! Je sais bien que c'est difficile à imaginer, mais je n'ai eu de cesse de béer d'admiration devant la nature qui s'offrait à moi. À au moins deux reprises, je me suis tout simplement immobilisée pour contempler le blanc plus que blanc de la neige fraîchement tombée et écouter le parfait plus que parfait silence ouaté de l'hiver. Vous ai-je dit à quel point le ciel était bleu? Bleu sur blanc. Les couleurs qui vont de pair lorsque l'hiver consent à se laisser aimer.

J'avais choisi en plus de sortir les oreilles ouvertes. Pas obstruées par les écouteurs comme je le fais d'habitude. Je pouvais donc tout entendre de la tranquillité ambiante. C'est sûr qu'il n'y avait pas foule sur les trottoirs! Tant mieux. J'avais toute la froidure pour moi seule. Et je me tenais droite en haut de la petite côte immaculée menant à l'église en ne cessant de répéter pour mon moi-même : "Que c'est beau! Vraiment que c'est beau!" Et, aveuglée par le soleil qui baissait doucement à l'horizon, je me tenais droite dans le sentier qui longe l'école en criant presque ma gratitude de pouvoir être là, juste là au moment où le soleil lançait ses derniers feux avant l'adieu final. À propos, vous avez remarqué qu'ils sont rose pâle ses rayons l'hiver? Sans doute parce qu'ils semblent venir de plus loin. Et peut-être le sont-ils dans les faits. Je n'y connais rien en astronomie et je n'en n'ai cure lorsqu'il s'agit de me laisser attendrir par la lumière se reflétant sur une immense couverture blanche.

Vivifiant, l'air était! Ragaillardie, moi j'étais!

mardi 10 janvier 2012

Le grand luxe

C'est comme ça que j'ai commencé ma journée. Dans le luxe. Celui de pouvoir profiter d'un beau soleil matinal en me rendant à pied retrouver ma merveilleuse gang de la Soupière après presque deux semaines d'absence. L'air était frais et doux. J'ai respiré un grand coup et j'ai rendu grâce une fois encore pour cet immense privilège d'avoir recouvré ma liberté.

Si vous saviez comme je les savoure ces débuts de semaine lorsque je déambule devant la cour d'école de mon pas plus jamais pressé (sauf quand j'emprunte les habits de la Marcheuse urbaine) et que j'entends la cloche appelant les élèves rieurs à retourner au sérieux des études. C'est sûr que je me dis que ce temps est fini pour moi; par contre, le chemin sur lequel je me trouve en ce moment est vraiment fort agréable. C'est que je vis dans le luxe. Par exemple, le luxe plus ultra de pouvoir choisir la façon dont je passe mon temps. Et j'adore notamment faire oeuvre utile. J'en retire une énorme satisfaction. Ainsi, j'ai passé une partie de la journée à souhaiter un bon début d'année à tous les gens que je rencontrais. Imaginez les sourires, les étreintes, les voeux échangés! Ça vous remplit un coeur plus vite qu'il n'en faut pour dire "J'ai besoin d'amour".

J'ai bénévolé pratiquement toute la journée. Mes gâteries cuisinées sont maintenant populaires et attendues. J'ai eu droit pour la première fois à un "Qu'est-ce que vous nous avez préparé cette semaine?" et, plus intéressant encore, à un "Est-ce que je pourrais avoir la recette?" Voilà qui est encourageant et qui aide à tisser des liens. J'ai même échangé quelques trucs de cuisine avec G. qui m'a parlé de ses expériences en pâtisserie pendant le temps des fêtes. J'adore.

En revenant à la maison, je repensais à mes rencontres mais aussi aux paniers de victuailles que nous avions préparés. Vous ai-je déjà dit que nous devons très souvent diviser les gros sacs de riz ou de pâtes, les boîtes de céréales format familial et même les paquets de biscuits pour les mettre dans de petits sacs afin de faire durer nos provisions? Je comprends totalement cette façon de procéder étant donné les ressources limitées dont nous disposons. Cependant, je n'ai pas pu m'empêcher de revenir à l'idée du luxe. Réalisez-vous que lire les étiquettes des produits que nous achetons en faisant l'épicerie constitue en soi un luxe de taille? Je me suis demandée comment je réagirais en recevant du riz dans un sac en plastique. Serais-je capable de reconnaître qu'il s'agit de riz basmati ou de simple riz à grain long? Si je ne savais pas déjà comment le faire cuire, je serais drôlement embêtée de trouver de quelconques indications sur un sac anonyme. De même, si j'avais des problèmes de santé comme le diabète ou des allergies, comment ferais-je pour vérifier les ingrédients des céréales mises dans des enveloppes transparentes sans mention aucune de leur valeur nutritive ou de toute autre information?

J'ai soudainement réalisé le luxe dont nous jouissons dans plein de choses que nous prenons pour acquises. Je crois bien que je ne pourrai plus jamais lire une étiquette sans y penser dorénavant. Le luxe vous dis-je, le grand luxe!

dimanche 8 janvier 2012

Animal

Imaginez-vous que j'ai un problème de lèse-majesté avec mes deux félines. Vous vous souviendrez peut-être que, peu avant les fêtes, j'ai offert à Mignonne un beau petit lit douillet que j'ai placé devant la fenêtre du salon, son endroit de prédilection pour observer les oiseaux. Jusqu'à tout récemment, ce présent n'avait soulevé aucun intérêt de la part de la Reine-Marguerite. Mais ça c'était avant que la maîtresse souveraine des lieux ne décide de mettre une patte sur la couverture en polar qui tapisse la couche de sa rivale. Je crois qu'elle a immédiatement aimé puisqu'elle a immédiatement adopté le nid duveteux. Depuis ce temps, Madame trône et chasse en grognant sa pauvre sujette effarouchée.

L'Homme m'avait parlé du problème pendant que j'étais en vacances chez la soeur Psy. J'avais hâte de revenir à la maison pour acheter un autre lit. Ce que j'ai fait aujourd'hui. Seul hic : je ne sais pas trop la stratégie sur laquelle je devrais me rabattre. Pour le moment, j'ai placé le lit dans mon lit, autre endroit adoré de Mignonne qui s'y réfugie souvent, autant le jour que le soir. Sa première réaction m'a un peu découragée. Étant donné qu'il s'agit de l'exact même lit dans lequel se trouve l'exacte même couverture moelleuse (j'avais profité d'un deux pour un d'avant Noël), ma chatte peureuse ne s'y sent pas à l'aise. Je crois qu'elle pense que c'est le lit de la tortionnaire et elle n'ose pas s'y lover. De son côté, l'usurpatrice n'a pas encore constaté la présence du nouvel objet et elle dort, au moment où j'écris ces lignes, sur une autre couverture en polar placée celle-là sur le lit du Fils. Oui, les chats dorment tout le temps. Et oui, ils apprécient particulièrement tout ce qui est chaud et doux. Ne feriez-vous pas la même chose à leur place? Cette saga est donc à suivre.

Pour rester du côté félin, je vous signale que j'ai revu ce matin la maman chatte et seulement un bébé, soit le rouquin. Je ne peux pas dire que les deux semblaient particulièrement affamés ni mal en point. Je m'inquiète quand même pour le bébé noir. Par contre, en appelant la maman hier soir pour voir si elle était encore dans les environs, j'ai eu la surprise de voir apparaître un gentil chat noiraud très affectueux. Je dirais que c'est un ado. En tout cas, celui-là ne demande qu'à être adopté.

Toujours dehors, les espiègles sont maintenant sous la glace pour de bon. J'ai vérifié le fonctionnement du bulleur cet après-midi et tout "baigne" de ce côté. J'espère maintenant que l'Homme n'aura aucun cadavre à ramasser au printemps. Croyez-vous que les batraciens ont réussi à trouver un refuge et qu'ils reviendront avec la belle température? Pas de corps mort à déclarer et le retour de Gertrude et de sa gang, voilà le bilan que je me souhaite après le grand froid.

En attendant, je dois vous apprendre le décès de Mimi. Mignonne avait raison de monter le guet devant les armoires de la cuisine. Il y avait bien une représentante de la gent trotte-menue qui a malheureusement connu une fin tragique en voulant déguster un morceau de pain pita sur la trappe fatale. Ce fut hélas son dernier repas! Dans le monde animal, c'est la loi du plus fort qui l'emporte.
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Notes pédestres : J'ai retrouvé mes trottoirs chéris. Même recouverts d'un peu de neige ou de glace, ils étaient là. Je les ai parcourus avec délectation, mais surtout avec une forme resplendissante dont je ne me croyais pas capable étant donné les abus alimentaires et alcooliques imputables aux festivités de la saison. Le corps a tenu bon!

samedi 7 janvier 2012

Du Wi Fi Fi dans l'autobus

Une chronique axée sur le moment présent dont on ne peut profiter puisqu'il est déjà passé! (réflexion inspirée par la soeur Psy)

C'est la première fois que je blogue dans un autobus. J'adore profiter de la technologie à portée du clavier. Je suis chanceuse en plus. Personne à ma gauche. J'ai les deux bancs pour moi seule. J'ai été obligée toutefois de faire un petit changement d'emplacement pour m'éviter d'avoir à endurer les écouteurs d'un jeune passager dont je ne m'explique toujours pas le comportement. À quoi ça sert d'avoir ce genre de bidules si on ne les met pas sur ses oreilles? C'est mon âge vénérable sans doute, mais je ne saisis pas la raison pour laquelle on voudrait faire partager ses goûts musicaux à des gens qui n'en n'ont cure!

Attention! Attention! Au moment où je m'apprête à jubiler pour savourer pleinement le trajet qui me ramène à mon "home sweet home", je suis perturbée cette fois par un danseur qui essaie de se trouver un remplaçant pour son prochain cours de salsa. Cela donne lieu à plusieurs coups de fil et à des conversations intéressantes mais complètement inutiles pour l'ensemble du wagon.

Bon, le calme est revenu. Alors, vous aurez deviné que je reviens déjà de ma semaine de vacances passée avec la soeur Psy, semaine fort occupée dois-je le reconnaître. Nous avons eu le temps notamment de voir deux films et de passer une journée complète au Musée de la Civilisation pour visiter quatre expositions dont une sur Rome et l'autre sur les 75 ans de Radio-Canada. Cette dernière nous a fourni l'occasion entre autres de renouer avec les émissions de notre enfance. C'était pas mal amusant d'entendre les gens de notre génération en train de fredonner les thèmes musicaux de Sol et Gobelet, de La Souris Verte ou du Pirate Maboule. C'était plus fort que nous. Dès que les premières notes se faisaient entendre, les refrains revenaient à notre mémoire. Comme s'ils avaient toujours été là, tout près, et qu'ils n'attendaient que la possibilité de refaire surface pour nous permettre de nous replonger dans nos folles années d'insouciance. Et que dire des cris d'exclamation inévitablement poussés en passant devant les costumes de nos personnages préférés. Pour ma part, j'étais certaine que Bobinette était beaucoup plus petite. J'ai donc eu un choc devant la vitrine qui présentait ses robes et ses déguisements.

Comme vous devez vous en douter, les émissions pour enfants ne constituaient pas l'unique point d'intérêt de cette récapitulation de l'histoire de notre société d'État. Les documents audios des correspondants étrangers relatant par exemple le débarquement de Normandie ou le premier Noël des soldats canadiens à l'extérieur du pays étaient saisissants de vérité. Les descriptions étaient si fortes que nous avions l'impression d'être là. Je pouvais sans peine imaginer les familles de l'époque réunies autour du poste de radio retenant leur souffle pendant que le journaliste donnait moult détails sur la plage où les combats venaient d'avoir lieu, ou pleurant en entendant un groupe d'ambulanciers et de membres du personnel médical en train de chanter un hymne de saison pour réconforter les blessés. Bref, une exposition où on revit des pans entiers de notre petite et grande histoire.

Je viens de me rendre compte, en jetant un coup d'oeil par la fenêtre, que la route est vraiment mauvaise. Les deux voies sont à peine dégagées et il neige à plein ciel. C'est particulièrement épeurant quand le chauffeur dépasse et qu'il doit traverser le milieu de la chaussée. En tout cas, paraît que les autobus passent partout. Je me croise quand même les doigts et je vérifie si ma médaille du Frère André se trouve toujours dans ma poche de jeans. On ne sait jamais quand on peut avoir besoin d'un miracle.

Mon aventure en direct se poursuit. La neige a fait place à la pluie. Et je constate que la chaussée est maintenant dégagée. Je crois que cela est de bon augure. Je viens aussi de recevoir un appel de la Fille. C'est à mon tour de déranger les autres! Mais ça valait la peine (pour moi, pas pour les autres) puisque je vais voir mes deux chérubins pendant mon attente avant mon transfert vers Gatineau. J'ai maintenant très hâte d'arriver à Montréal. Il me reste environ une heure de trajet. C'est pas si pire. Entre deux paragraphes de blog, je m'occupe avec des jeux en ligne... et des recherches pour aggraver mon hypocondrie. De ce temps-là, je m'énerve parce que je sens du mucus dans ma gorge. Je viens d'aller sur un site où, étrangement, toutes les personnes qui racontaient leur histoire s'étaient faites prescrire, à un moment ou à un autre, des antidépresseurs et des calmants. Je crois que c'est un signe que je devrais cesser de m'en faire. Ce que je fais immédiatement.

Plus qu'une demi-heure. Nous nous dirigeons vers Longueuil. Pas étonnant que le parcours soit si long. Ce sont les détours qui jouent des tours. Je prends mon mal en patience. En attendant, je constate que le doux temps fait en sorte qu'il n'y a pratiquement plus de neige à Montréal. Je vois le gazon au travers du tapis blanc. On dirait le printemps. Je ne sais pas si c'est la même chose à la maison étant donné que l'Homme passait la souffleuse encore hier soir. Je vais voir tout ça bientôt.

La pause Montréal s'est bien déroulée. J'ai eu le temps de me sustenter en bonne compagnie avant de reprendre le dernier wagon. Je commence à être plus fébrile à la pensée de retrouver l'Homme et mes deux félines. Comme je disais au Fils que je croyais que l'Homme s'était ennuyé de moi pendant mon séjour à Québec, j'ai eu droit à cette réplique de mon pince-sans-rire préféré : "Pourquoi? Il n'a plus de chandail propre et il ne trouve plus de bouffe dans le frigo?" Très drôle et sans doute un peu vrai. Faut bien servir à quelque chose dans la vie. Je me présente : la Marcheuse urbaine ménagère!

mardi 3 janvier 2012

Du macadam au sentier de neige

Crouche... crouche... C'est le bruit que mes pas faisaient aujourd'hui pendant que je parcourais les sentiers du Marais du Nord en compagnie de la soeur Psy. Changement radical de décor pour la Marcheuse urbaine qui troque les trottoirs pour la neige qui craque.

Les diseurs de bonne température avaient annoncé un froid glacial. Pour une fois, ils ne s'étaient pas trompés. Mais il en faut plus pour arrêter deux soeurs décidées à dépenser les calories supplémentaires ingurgitées pendant les fêtes! Seule chose que je ne dois pas faire si je ne veux pas hiberner pour le reste de la saison, c'est d'éviter de regarder ce que sera la température ressentie. Cette nouvelle donnée que l'on nous largue dorénavant consiste à nous indiquer le temps réel qu'il fera en tenant compte du facteur éolien. Cela m'angoisse terriblement. Et pour cause. Ainsi, on peut vous annoncer un -16 degrés qui se transformera en -30 une fois que vous aurez mis le nez dehors. Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais si on me dit qu'il va faire un froid sibérien, je reste à la chaleur et je me roule en boule comme les chattes.

Faisant donc fi de ce que je ressentirais, j'ai revêtu combinaison, pantalon de nylon, maillot de corps et tout le tralala nécessaire à une expédition nordique pour me rendre à l'endroit où, selon la soeur Psy, j'irais à la fois nourrir mon âme et purifier mes poumons. En arrivant au paradis du Grand Nord, nous sommes saluées par la préposée à l'accueil qui nous lance un encourageant "Eh! vous êtes venues braver le froid! Les gens restent en moyenne une heure aujourd'hui avant de déclarer forfait." Voilà qui donne envie de faire demi-tour sans plus attendre. Ce que nous n'avons heureusement pas fait.

La soeur Psy avait raison. C'était merveilleux, comme un décor peint, de voir défilant devant nos yeux les petits sapins. Oui, ce sont bien les paroles de la fameuse chanson de saison Promenade en traîneau, sauf que nous, nous avons fait la promenade à pied. Nous avions apporté des graines de tournesol et nous avons nourri des mésanges qui venaient sans aucune gêne se poser dans le creux de nos mains. J'ai aussi sustenté un charmant petit écureuil dont j'ai pu admirer les moustaches à deux pas de mon nez. Même s'il nous arrivait de croiser d'autres vaillants randonneurs, nous étions la plupart du temps enveloppées dans le silence de la forêt. Nous avons pris un sentier qui nous a éventuellement conduites à un belvédère d'où nous avons pu admirer un lac et des montagnes entre de magnifiques sapins recouverts de la neige fraîche tombée hier. Nous avons alors philosophé en nous imaginant que cette beauté et cette tranquillité devaient ressembler à ce que l'on ressent quand on meurt. Et la finitude devenait soudainement plus facile à imaginer et à accepter.

À notre grand étonnement, nous avons marché une heure et demie sans avoir froid toutes animées que nous étions du brasier qui nous réchauffait l'intérieur. Comme ce peut être bon la vie!

dimanche 1 janvier 2012

Bonne année mais sera-ce la dernière?

L'année 2012 est là, et avec elle l'annonce des prophètes de malheur qu'elle sera peut-être la fin de notre existence sur Terre. Je ne sais pas pour vous mais moi j'ai comme au-dedans un léger goût de déjà vu et de déjà entendu. Le bogue de l'an 2000, ça vous rappelle quelque chose? Au tournant de minuit le 1er janvier de l'année fatidique marquant le début du nouveau millénaire, tout devait s'arrêter électroniquement parlant. Je me souviens de notre scepticisme marqué quand même du sceau de l'inquiétude pas nécessairement bien dissimulée. Nous nous moquions des précautions prises par les gouvernements, les banques et autres institutions. Nous faisions des blagues sur les scénarios catastrophiques échafaudés par les plus pessimistes. Mais quand nous nous retrouvions tout fin seul avec notre nous-même, nous nous surprenions à penser : "Et si c'était vrai?"

Alors, cette fois-ci, sera-ce vraiment la vraie de vraie fin du monde? J'ai entendu aujourd'hui que nous avions jusqu'au 21 décembre de la nouvelle année pour profiter à plein du reste de notre vie. Aussi bien éliminer tout de suite l'habitude éculée de prendre des résolutions. En effet, à quoi bon arrêter de fumer si nous sommes pour crever de toute façon? Pourquoi commencer à faire de l'exercice si c'est uniquement pour se retrouver avec un beau corps mort? Et que dire de la possibilité d'éliminer la dive bouteille au moment où nous aurons tellement besoin de la vider pour accepter l'idée de notre finitude? Non, je proclame plutôt que l'année 2012 soit celle où nous vivions chaque jour comme s'il était le dernier. N'est-ce pas LA façon de demeurer dans le présent?

Comme je serai obligée de ne rien voir venir à l'horizon, je pense que mon anxiété devrait s'améliorer. M'occuper uniquement de la minute qui passe sans égard aux heures qui suivent devrait modifier ma propension à vouloir tout contrôler, tout planifier. Je sais. Je vais devenir une cigale et chanter toute l'année. Et quand soufflera la bise ultime, eh! bien, je danserai avant de m'éteindre.

Je termine en nous souhaitant bonne continuation. Sur ce, je dois vous quitter car je viens de voir passer un vermisseau que j'ai curieusement envie de me mettre sous la dent!