dimanche 30 janvier 2011

Petit dimanche

Qu'il faisait beau aujourd'hui! Un merveilleux soleil. Un ciel d'un bleu éclatant. Et la neige immaculée parce que fraîchement tombée du matin. Dès que j'ai mis les pieds dehors, j'ai senti que mes trottoirs chéris ne me décevraient pas. J'ai eu presque raison. C'est que les quelques centimètres de poudre blanche n'avaient évidemment pas été déblayés. Comme il ne faisait pas très froid, l'amalgame jeunes flocons de neige et vieille gadoue rendait plus difficile la possibilité de garder le rythme. C'était donc plus exigeant pour les jambes. Qu'importe. Je respirais à pleins poumons et je souriais à mon moi-même.

Autre bonne nouvelle : j'ai retrouvé mon énergie métal. Sur la batterie déchaînée et les prouesses vocales de deux de mes groupes fétiches, soit Dark Tranquillity et As I Lay Dying, j'ai senti que mes tripes avaient le goût d'être encore concernées. J'ai chanté des bouts et je me suis laissée remplir complètement par les accents métalliques. Ça donne de la puissance en-dedans pour bien débuter la semaine.

J'arrête là avant de devenir plate. Ma marche a été le moment clé de ma journée que j'ai autrement passé à lire mon journal, faire du lavage et cuisiner. À ce sujet, j'ai pour ainsi dire raté ma soupe, qui devait être une crème de céleri et de pommes, et j'ai véritablement massacré le dessert qui lui devait être un genre de gâteau-déjeuner aux pommes. L'Homme vient de me raconter justement (car il est courageux et met sa vie en danger depuis des années en jouant au goûteur) qu'en voulant tailler ledit gâteau, il a vu la pointe qu'il avait réussi à se découper faire un bond en dehors du moule pour se déposer lourdement sur le comptoir de la cuisine. Mais l'Homme ne baisse pas les bras facilement, surtout quand il s'agit de dessert. Il a donc récupéré le morceau de gâteau qu'il a ensuite mis au micro-ondes et recouvert de yogourt glacé et de sirop d'érable. Il semble qu'avec tous ces ingrédients, c'était mangeable. Yé! Voilà le commentaire que je veux recueillir quand je me transforme en Martha-Reine de la cuisine. Mangeable! Si au moins on parlait de la personne ici, me semble que j'en tirerais une plus grande satisfaction. :))

samedi 29 janvier 2011

Oscar et les naufragés

Je pourrais vous parler des deux films que j'ai visionnés hier et aujourd'hui, deux oeuvres primées pour les Oscars, soit The King's Speech et Incendies. Mais je viens tout juste d'écouter le premier épisode du documentaire Naufragés des villes sur TOU.TV et je suis un peu chavirée. Il s'agit d'une série de reportages sur la pauvreté et sur les maux qu'elle engendre. J'avais lu quelques articles à ce sujet qui soulignaient le bon travail des auteurs qui veulent nous faire voir de quelle façon ce phénomène teinte notre société et nous faire réaliser sa proximité. Car on ne parle pas ici de gens qui sont à l'autre bout du monde, mais plutôt de personnes que nous pouvons côtoyer tous les jours.

Outre le fait de nous présenter des données sur la pauvreté et de nous permettre de profiter des commentaires de chercheurs dans le domaine, les réalisateurs ont demandé à deux volontaires de tenter l'expérience de vivre pendant deux mois comme des pauvres. Ces volontaires devront tout quitter et accepter de se débrouiller sans rien d’autre qu’un sac à dos et un chèque d’aide sociale de 592,08 $ en poche. Au cours du premier épisode, nous les suivons pendant qu'ils sont en quête d'un toit pour la nuit et, idéalement, pour le mois.

Pas facile de voir Emmanuelle Chapados jeune diplômée en communication, être obligée de passer la nuit à la gare d'autobus de Montréal parce qu'il n'y aucun logement de libre pour l'accueillir même parmi les ressources d'urgence. Même si Pierre Gingras, consultant en marketing, est plus chanceux parce qu'il se trouve un appartement en colocation, il n'en reste pas moins que sa petite chambre minable se trouve à des années-lumières du bel appartement lumineux qu'il habite à Québec. Et ce n'est là que le début de leurs tribulations.

Je retiens notamment qu'il y a un peu plus de trois millions de pauvres au Canada et qu'un Montréalais sur quatre vit sous le seuil de la pauvreté. J'ai été particulièrement touchée par une remarque du narrateur de cette semaine, Urbain Desbois, qui affirme que ce sont rarement les gens riches qui tendent la main aux pauvres. Ce sont plutôt les pauvres qui aident les pauvres. Il ajoute que les pauvres ne jugent pas quand ils te viennent en aide. Ils te prennent où tu es et t'acceptent comme tel.

Comme vous voyez, je me suis vite éloignée du tapis rouge de Hollywood pour m'enfarger dans les trous du tapis élimé de la pauvreté. Ça brille moins de l'extérieur mais ça resplendit de l'intérieur.

vendredi 28 janvier 2011

Zénitude, quand donc m'habiteras-tu?

J'angoisse à un niveau presque toujours élevé ces jours-ci. Par conséquent, je ne suis pas du monde, monde que je n'endure qu'avec grand-peine car je ne m'endure souvent pas moi-même. Bref, mes relations interpersonnelles sont plus difficiles. Rebref, j'ai eu un dîner très moche avec l'Homme et la Fille hier.

J'ai eu le temps de me rattraper un peu avec l'Homme depuis et de battre ma coulpe. Par contre, la Fille ayant de nouveau quitté veaux, vaches, cochons et couvées pour une période plus ou moins déterminée, je suis restée avec mon malaise. J'y repensais encore ce matin en lisant mon journal quand je suis tombée sur cette citation du moine boudhiste Arnaud Desjardins cité dans la chronique de Josée Blanchette : "Oui, chacun de nous peut se transformer. Si nous progressons sur le chemin de la sagesse, nous voyons que notre bonheur et notre malheur dépendent de nos interprétations. Nous sommes heureux lorsque le monde correspond à notre attente du moment et plus il y correspond, plus nous sommes heureux."

J'ai interrompu immédiatement ma lecture pour la partager avec l'Homme qui tentait vainement de son côté de parcourir la section "Sports" de l'autre quotidien que nous recevons : "Tu vois, c'est ça qui est arrivé hier. Le monde n'a pas correspondu à mes attentes. Je voulais de l'empathie, des tapes sur l'épaule et des visages compatissants. Je voulais sentir que l'on comprenait mes angoisses existentielles. Au lieu de ça, j'ai reçu un message boomerang m'enjoignant plutôt durement de régler mes problèmes moi-même. Pourtant, je ne demandais pas une solution, seulement de la compassion."

J'ai poussé un soupir. J'avais encore de la peine. J'ai repris ma lecture. La citation était plus longue que je l'avais cru : "Or, il se trouve que nous n'avons qu'un pouvoir très limité pour faire en sorte que cette correspondance s'établisse. Le plus souvent, le monde ne correspond pas à ma demande et j'en souffre. Cette situation s'amplifie dans les relations avec autrui..." Tu parles! S'cusez mon intempestive réaction. Je laisse le moine poursuivre : "Mais, nous pouvons renverser la perspective : et si c'était à nous de correspondre à chaque moment à l'indiscutable vérité du monde?"

C'est là que je me suis rendue compte de l'ampleur du chemin à parcourir. Pas étonnant que je recherche toujours la zénitude. Je ne regarde pas à la bonne place. J'appréhende le monde en fonction de moi au lieu de me définir face au monde. Je travaille beaucoup sur le lâcher prise mais ce n'est pas encore assez. Pourtant, je sais que c'est là que la paix intérieure va commencer. Je sais aussi que, pour pleinement profiter de ma retraite (et de ma vieillesse), je devrai rendre modeste mon ego pour m'ouvrir davantage au monde. Et je devrai aussi accepter modestement ce que les autres sont disposés à m'apporter. Dernière chose : je ne devrai pas oublier non plus de cultiver la reconnaissance pour tous les petits bonheurs que la vie me réserve. Ouf! Voilà tout un programme de vie ou, plus justement, le programme de toute une vie!
__________________________
Notes pédestres : Parlant de petit bonheur, c'en était un aujourd'hui d'arpenter les trottoirs. Je me croyais au printemps avec la température clémente et les oiseaux qui chantent. Curieusement, c'est la deuxième journée que je marchais sans ma musique. Je ne sais pas ce qui se passe. Peut-être que j'ai besoin de m'intérioriser au lieu de m'énergiser.

mercredi 26 janvier 2011

La vie (ou la mort) au bureau - L'invincible Vanessa

(Sixième épisode du feuilleton clérical le plus enlevant du Web. Pour rattraper les aventures précédentes de Vanessa, voir la colonne de gauche du blog.)

Consternation! Jeannot le clown venait d'être emmené par la police. Elle aurait bien dû sans douter. Il n'avait tout simplement pas l'étoffe pour éliminer Vanessa.

Lors de la rencontre au café du coin deux semaines auparavant, elle et le clown-tueur avaient convenu qu'il serait plus facile de faire disparaître Vanessa en exécutant le complot machiavélique directement au bureau. En effet, la béni-oui-oui était un véritable bourreau de travail exécutant principalement ses tâches pendant la nuit. Les complices en étaient venus à la conclusion qu'ils pourraient ainsi se débarasser en toute quiétude de l'empêcheuse de tourner en rond. Restait à trouver le mode d'emploi pour que la future victime soit exécutée sans bavure.

D'âpres discussions surgit tout de même un plan à exécuter. Il fut convenu qu'après avoir aidé Jeannot le clown à franchir les barrières de sécurité et à emprunter l'ascenseur, elle le conduirait à l'endroit du crime à perpétrer, c'est-à-dire la fameuse grosse poubelle verte située dans le corridor en face de la petite cuisine. C'est en effet là qu'elle avait décidé d'abandonner la dépouille de sa rivale. Cela ne l'inquiétait pas outre mesure de tenter une nouvelle fois de transformer Vanessa en déchet puisque Jeannot le clown serait là pour assurer la réussite de son projet qui lui permettrait enfin de retrouver son inaction, finalement bienheureuse, d'autrefois.

Le soir dit, elle laissa Jeannot le clown près de la poubelle et se dirigea vers son bureau où, bien évidemment, la poupée gonflable vaquait tranquillement à ses tâches cléricales. "Pas surprenant que le patron ne cesse de me gratifier de primes au rendement, cette marionnette remplie d'hélium ne connaît pas la fatigue", marmonna-t-elle en s'approchant doucement. "Allez ma vieille, c'est fini le zèle. Tu as outrepassé les consignes. Toi qui devais me faciliter la vie, tu es devenue une emmerdeuse de première classe. Pour te remercier de m'avoir donné plus de travail mais surtout d'avoir fait en sorte que je me suis tournée en ridicule au party de Noël, je t'ai concocté une surprise de mon cru. J'espère que tu aimes rire." Et elle roula jusqu'à son meurtrier la poupée assise sur sa chaise.

En voyant les gros totons de sa victime, Jeannot le clown poussa un couac approbateur dans sa trompette. "Wow! j'comprends que cette jolie demoiselle t'indispose. C'est sûr qu'elle ne passe pas inaperçue," s'exclama-t-il, un léger filet de bave dégoulinant le long de sa bouche exagérément accentuée par un rouge criard. "Bon, bon, reviens-en. T'as intérêt à reprendre ton sang-froid. Je te rappelle que si tu veux être payé, cette jolie demoiselle, comme tu dis, doit être mise à la rue. T'as donc intérêt à t'activer", lui rétorqua-t-elle en tournant les talons. Pendant qu'il exécuterait sa sale besogne, elle irait effacer toute trace compromettante dans le bureau.

Poussant un soupir de dépit, Jeannot le clown entreprit de soulever Vanessa afin de pouvoir mieux procéder à son démembrement. "Mais c'est que tu fais pas dans le poids plume", ahana-t-il en sortant un couteau de sa besace clownesque. Ce n'était pas évident de tenir cette grosse poupée d'une main et de tenter de lui découper un bras de l'autre. Ce qui devait arriver arriva donc. En voulant soulever Vanessa un peu plus haut pour se donner une meilleure prise, Jeannot le clown n'avait pas vu qu'il était à deux doigts du signal d'alarme. Mais Vanessa si. Sa main accrocha le levier et une sirène se déclencha automatiquement. Pris de panique, le tueur bouffon laissa tomber la poupée sur le plancher et se précipita vers l'escalier de secours.

Totalement sidérée par le bruit strident de la sirène, elle sortit précipitamment de son bureau pour aller voir ce qui se passait. Vanessa était étendue par terre, toujours en vie. Par ailleurs, elle eut le temps d'apercevoir Jeannot qui s'enfuyait les jambes à son cou. Prévoyant l'arrivée imminente des gardiens de sécurité, elle réussit à installer l'invincible Vanessa sur sa chaise et à la ramener à son bureau. C'est de sa fenêtre qu'elle assista ensuite à l'arrestation de son complice.

Aux forces de l'ordre qui l'interrogeaient, elle jura haut et fort qu'elle n'avait eu connaissance de rien car trop concentrée sur son travail. Les autorités conclurent que Jeannot le clown, surpris par la présence d'une employée sur l'étage, avait décidé de rebrousser chemin sans accomplir le méfait pour lequel il était entré par effraction dans l'immeuble. Et le signal d'alarme? Une anomalie? Une défectuosité? À ce jour, on se perd en conjectures. On a bien relevé des empreintes digitales sur le levier mais on a été incapable de retracer à qui elles appartenaient. Le mystère perdure.

mardi 25 janvier 2011

En prime, la déprime!

J'ai acheté le magazine L'Itinéraire quand je suis allée à Montréal en fin de semaine. Pour ceusses et celles qui ne connaissent pas, il s'agit d'une publication qui contient principalement des articles rédigés par des journalistes de rue. Elle est vendue par des camelots qui sont des travailleurs autonomes. Grâce à cette initiative, des personnes de la rue améliorent leur situation. Je me fais un point d'honneur de me procurer le magazine et, souvent, de discuter aussi avec le camelot. Je découvre presque toujours des gens formidables qui ne demandent qu'à échanger et à jaser pendant quelques minutes. J'aime.

Dans la section intitulée Mots de camelots de ce numéro, j'ai gardé en tête le texte de Gilles Bélanger qui parle de la déprime du mois de janvier. J'ai parcouru une première fois rapidement son article sans trop m'arrêter à penser qu'il pouvait s'appliquer à moi. Mais, mais, c'était sans compter sur les bobines mnémoniques! Depuis hier, je me demande si je ne suis justement pas atteinte de cette fameuse déprime.

Pour quelles raisons, je vous interpelle, pourrais-je donc avoir le moral entre les deux jambes? Nonobstant mes inquiétudes totoniques, rien ne devrait troubler les eaux calmes de ma mer(mère?) intérieure. Et pourtant. Je trouve plein d'affaires qui me tombent sur les nerfs et qui m'empêchent d'approfondir la zénitude à laquelle j'aspire tant.

Prenez le froid, par exemple. Je sais que ça fait seulement quelques jours qu'il sévit. J'en ai tout de même ras-le-bol. Comme si ce n'était pas suffisamment pénible d'avoir à prendre l'autobus en pleine nuit (maudite noirceur!), je dois maintenant me transformer en ours polaire pour être en mesure d'affronter la température sibérienne. Je peux vous dire en tout cas que je n'ai vu aucune banquise menacée de fonte prématurée autour de moi. Rien que du frette.

Et la lumière, ou plutôt son absence, joue aussi sur mes humeurs. C'est sûr que ce n'est pas une révélation pour moi, mais je constate néanmoins une augmentation de mon désir de rester cachée sous les couvertures et en pyjama toute la journée. Dur, dur donc de trouver le courage de me lever tous les matins. Des fois je regarde vers le bassin, réduit à un minuscule trou d'aération sous la respiration artificielle du bulleur, perdu dans ma cour toute enneigée et je sens un grand désespoir m'envahir. Comme si cette immobilité allait s'éterniser. Bon. C'est le temps de passer aux conseils de Gilles.

Voici donc ce que notre cher camelot recommande "à toutes les personnes qui connaissent la déprime de janvier et pour qui cette déprime se prolonge souvent jusqu'au printemps". Il nous conseille sagement de vivre un jour à la fois, de s'occuper et de ne pas rester seul. Je pense que c'est faisable. J'oserais même dire que c'est applicable pour tous les genres de déprime. Qui aurait dit que je trouverais une panacée dans la rue? Comme quoi on ne sait jamais d'où vient notre salut.
____________________________
Notes pédestres : Je crois que ces notes s'imposent ce soir après deux jours de grelottement intensif. La température s'était adoucie à la fin de la journée. J'ai retrouvé mes trottoirs, ma musique, ma bulle. C'était bon. Me semble que le moral est moins au ras des pâquerettes, lesquelles se font plutôt rares ces temps-ci!

dimanche 23 janvier 2011

Deux images, deux mille mots

J'aime assez quand des images de ma vie quotidienne reviennent me hanter ou, plus exactement, m'entraîner dans les méandres des bobines enregistrées par mon cerveau. Quand elles refont ainsi surface, je sais que je dois y revenir sinon elles ne voudront pas se laisser classer dans les archives, archives auxquelles j'espère être en mesure d'avoir accès encore longtemps :).

La première photo donc, pas très drôle, je l'ai prise jeudi après-midi. Je m'étais absentée du bureau pour tenter d'abaisser mon niveau d'anxiété lequel avait grimpé d'un cran après la première rencontre de mon groupe de discussion sur la retraite le soir précédent. C'est que, voyez-vous, dans un élan du coeur que je n'ai évidemment pas pu contrôler, je me suis soudainement surprise à exprimer aux autres participantes à quel point je souffrais de mon inaction cléricale. Comme vous le savez, je suis sur la ligne de touche depuis un bout de temps maintenant et je me rends compte que je commence sérieusement à souffrir de la situation. Disons que, ne serait-ce que pour cette reprise de conscience, je suis déjà satisfaite d'avoir accepté de faire partie de ce groupe pilote.

Léger aparté, comme j'en ai parfois l'habitude, pour revenir à jeudi après-midi. Je suis en train de parcourir mes trottoirs chéris toute heureuse de pouvoir le faire en plein jour et au gros soleil. Je suis partie depuis environ quinze minutes et je me prépare à arpenter deux longues rues. J'en suis à la moitié de la première quand je passe, presque sans la voir, devant une petite chatte d'Espagne roulée en boule contre le banc de neige. Mon coeur s'arrête. Je vois bien qu'elle est complètement immobile, donc morte. Je vous l'écris et j'ai les larmes qui me montent aux yeux. Je sais, je sais, je suis hyper sensible, mais vous connaissez aussi mon amour indéfectible pour les félins. Son pelage était tout beau et luisant, ce qui m'a amené à conclure qu'il ne s'agissait sans doute pas d'un chat abandonné mais probablement d'un pauvre minou de maison qui avait été mis dehors pour sa promenade quotidienne. J'imagine que l'animal a été frappé par une voiture. Je dois vous dire que je ne me suis pas attardée à examiner le cadavre. J'essayais seulement de reprendre la route en contenant mes émotions. Je pensais à un moment donné que j'étais pour m'effondrer. Je sais, je sais, c'est fort comme réaction, mais vous ne savez pas à quel point je peux faire grimper ma tension artérielle. Ma zénitude n'est la plupart du temps qu'une utopie que je tente vainement de transformer en réalité. Dur, dur, d'être coooool!!

La deuxième image dont je veux vous parler est un peu plus vivante... ou presque. Hier midi, j'étais à Montréal en compagnie entre autres de l'Homme, du Fils et de la Fille. Nous étions dans un restaurant chinois pour le dim sum - repas au cours duquel un assortiment de bouchées cantonaises cuites à la vapeur ou frites, sucrées ou salées, sont traditionnellement présentées sur des chariots qui sont déplacés de table en table par des serveurs (définition du dictionnaire). Nous étions tous assis autour d'une table ronde quand j'ai soudainement remarqué que, de ma place, j'avais une vue imprenable sur un immense aquarium dans lequel se trouvaient de gros poissons. Ils n'avaient pas l'air d'avoir beaucoup d'espace pour nager. En tout cas, ils se déplaçaient très, très lentement. Vous me voyez venir, non? J'ai immédiatement fait un rapprochement avec mes barracudas adorés qui doivent fort probablement, surtout aujourd'hui à moins 20 degrés Celsius (moins 30 degrés avec le facteur éolien!), être complètement immobiles dans leur bassin.

Tous les jours, l'Homme ou moi allons nous assurer que le bulleur fonctionne et que le trou d'aération n'est pas bouché. Des fois, je m'inquiète (oui, encore!) parce que j'ai peur de donner de l'oxygène à une tombe. Ce serait tellement dommage car, malgré le fait qu'ils sont absolument malcommodes, mes barracudas ont conquis mon coeur d'amante des bêtes. Ce sera un triomphe sans précédent de les voir émerger au printemps. C'est ce que je me souhaite : continuer de croire que la vie est plus forte que tout!

mardi 18 janvier 2011

Ultime beauté

Que je trouve injuste quand la nature revêt ses plus beaux atours de ne pas être capable de la décrire comme elle le mérite! Ce soir, il neigeait à plein ciel lorsque je suis sortie sur les trottoirs. Le temps était doux. Après le froid sibérien, c'était le retour du confort ouaté. Au début, la neige ressemblait davantage à de la grêle, puis à de la pluie. Mais, après une heure, alors que je revenais à la maison, elle avait repris la forme que je préfère, celle de gros flocons blancs. Ils étaient des milliers à tomber. C'était tellement beau de les voir atterrir en tournoyant et en tourbillonnant. J'avais l'impression d'assister à un spectacle avec effets spéciaux. Deux fois, je me suis arrêtée pour contempler leur danse. J'ai même laissé tomber les écouteurs pour me remplir du silence paisible de la chute des confettis. J'ai aussi tendu ma main dégantée pour tenter d'en attraper quelques-uns. Hélas! ils fondaient dès qu'ils touchaient mes doigts ne laissant qu'une pauvre goutte d'eau là où, une fraction de seconde auparavant, tout un univers de dentelle miniature s'ouvrait à moi.

Toute entière absorbée par le calme étouffé de la neige qui se déposait doucement au sol, je me suis rappelée la fois où, en revenant de l'école - j'avais peut-être une dizaine d'années - je me suis carrément agenouillée dans le banc de neige devant la maison pour rendre grâce d'avoir la chance de contempler quelque chose d'aussi beau. Je me souviens que je me sentais prête à exploser de l'intérieur devant la grandeur du spectacle qui s'offrait à moi et je n'avais pu imaginer une autre façon d'exprimer l'appel plus grand que nature qui m'avait totalement envahi.

Je ne voulais plus rentrer ce soir. Je me sentais si bien. J'en étais même prête à accepter le fait qu'un jour je ferais corps avec cette nature qui me dépasse et qui m'éblouit depuis toujours. Sans doute parce que c'est là que tout commence et que tout finit.
______________________
Notes métalliques : Sur un autre registre complètement, je vous donne des nouvelles brèves du Pusher de metal. Il m'a envoyé hier soir un lien pour que je puisse écouter le nouveau vidéo de son groupe Mortör sur YouTube. Parce que je sais à quel point certains d'entre vous partagez ma passion pour cette musique des tripes, je suis heureuse de vous transmettre l'information. La chanson Death from Above est tirée de leur plus récent album Metal Ride. Mettez la gêne de côté et osez!

lundi 17 janvier 2011

Le signet

Le grand retour a eu lieu. La Fille est désormais dans nos murs. C'est tellement bizarre. Ça fait plus de quatre mois que je m'ennuie, que je m'inquiète, que je me réjouis, bref, que je la suis à distance. Et la voici enfin devant moi. Il y a eu étreinte, bien sûr, mais, curieusement, aucune larme. De ma part, c'est vraiment bizarre.

Depuis hier, j'ai comme une drôle d'impression. C'est comme si elle n'était jamais partie. Le train-train a repris sa place comme si rien ne s'était passé. "Si tu as du lavage, n'oublie pas de le mettre ce soir. Je vais faire une brassée avant de me coucher", que je lui ai lancé une demi-heure seulement après son arrivée. Comme si le linge sale devait être lavé tout de suite...

Elle a mangé un peu. Elle a jasé un peu. Nous avons parlé des fêtes et de comment ça s'était déroulé. Et puis son ami de coeur est venu la retrouver. Elle a disparu de nos murs aussi vite qu'elle y était entrée.

Ce soir, nous étions seules toutes les deux pour le souper. L'Homme était au travail. La Fille avait vidé le lave-vaisselle. Elle avait commencé à couper les légumes pour la soupe pendant que moi je m'activais toujours à mon fameux lavage. Faut croire que j'aime que les choses soient nettes! En tout cas, il y avait comme un malaise. La Fille a elle-même soulevé l'étrangeté de la situation en se demandant si nous devions considérer comme positif le fait que la routine reprenait le dessus aussi vite. Je lui ai répondu que c'était sans doute normal, que j'avais déjà lu quelque part qu'il s'agissait là d'une preuve de la solidité d'une amitié, entre autres, cette capacité de reprendre là où on a laissé.

J'imagine que si c'est vrai pour des amis, cela doit l'être aussi pour les membres d'une famille. N'empêche. Je sais bien que nous avons changé toutes les deux. Le livre est-il vraiment ouvert à la même page? Je ne crois pas. Cependant, tout comme on le fait quand on reprend la lecture d'un ouvrage qu'on a mis de côté pour un certain temps, il est sans doute indiqué de se familiariser de nouveau avec les pages qu'on a déjà lues, histoire de se remettre dans l'histoire.
_____________________________
Notes pédestres : Comme on disait par chez nous au Saguenay, il ne faisait pas froid ce soir pour marcher, il faisait frette! Ce n'est pas pour faire poétique que je vous annonce que la neige crissait sous mes pas. Et que dire de la senteur de créosote se dégageant de pratiquement toutes les cheminées du quartier? Elle me prenait tellement aux narines que je devais constamment chercher un répit en respirant dans mon foulard. Vous ai-je déjà confié que j'avais un problème avec les feux de foyer? Oui. Ah! bon, si vous le dites.

dimanche 16 janvier 2011

Prendre ses affaires en main... mais quelles affaires au juste?

J'en ai déjà parlé dans ce blog. Mais j'aborde de nouveau le sujet parce qu'il m'horripile toujours autant. En outre, il est dans l'air plus que jamais. J'ai nommé : la planification financière. Cette tare atteint souvent son apogée dans les différentes chroniques économiques publiées dans les journaux. C'est là que l'on peut lire la triste histoire vécue de pauvres hères qui viennent épancher leurs souffrances en public et solliciter les sages conseils d'experts censés les rassurer sur la déchéance qui les attend peut-être... ou pas.

Voici le cas d'un malheureux fonctionnaire d'Ottawa, qui réside en Ontario et qui prévoit prendre sa retraite l'an prochain à 55 ans. Voyez comme sa situation est désespérante : il bénéficiera d'une pension indexée d'environ 60 000 $ par année, il recevra une indemnité de départ de 60 000 $ qui sera transférée dans son REER pour éviter l'imposition fiscale, il possède déjà un REER d'une valeur de 50 000 $ (hélas composé uniquement de fonds communs de placement comme il nous l'apprend tristement) et il est également propriétaire d'un bungalow d'une valeur de 350 000 $ et d'un chalet de 85 000 $, tous deux libres d'hypothèque. Avouez que c'est là un cas déchirant de misère humaine pour reprendre une des expressions favorites de l'Homme!

Mais quel est donc le drame existentiel qui dérange le sommeil du pauvre fonctionnaire en question et qui l'a incité à se livrer à portefeuille ouvert aux lecteurs du journal? Eh! bien, il veut savoir comment il pourra arriver à vendre ses fonds communs pour acheter plutôt des actions et des obligations de grandes compagnies canadiennes. Effectivement, cela mérite réflexion. L'expert le rassure heureusement dès la première phrase en lui apprenant ce que je considère, dans ce cas, être une simple vérité de La Palice, soit qu'avec un avoir net après impôt totalisant autour de 857 000 $, il possède le pécule nécessaire pour prétendre à une retraite confortable à partir de 55 ans. Ouf! j'ai eu peur.

Pendant ce temps, à l'autre bout du spectre, un collègue de l'Homme a rendu l'âme ce matin après avoir vaillamment combattu un vilain cancer. Âgé de près de 60 ans, il a occupé comme dernier emploi un poste de commis-vendeur dans un commerce au détail. Sa femme fait du ménage pour une grosse compagnie. Tous les deux vivaient en appartement. Petit salaire, petite misère. Il a confié à l'Homme, quelques jours avant de s'éteindre, qu'il avait dû emprunter sur son assurance-vie pour être en mesure de donner quelques sous à sa femme afin que celle-ci puisse entre autres s'absenter de son travail pour venir le voir à l'hôpital. Avait-il déjà pensé au "pécule" dont il disposerait... ou pas à sa retraite? Je l'ignore. Ce que je sais, par contre, c'est que sa situation correspond à celle vécue par une grande majorité de personnes. Et je sais aussi que ces personnes ne font pas exprès pour jouer à la cigale insouciante quand il s'agit de préparer leurs vieux jours. Non. Toutes les paies, elles sont occupées à vivre ou à survivre, c'est selon.

C'est ça qui me dérange dans le discours actuel. Tout d'abord, l'arrivée massive des baby-boomers à la fin de leur durée de vie active semble être une révélation. Tout d'un coup, nos gouvernements se demandent comment ils vont nous soigner (car je fais partie de ce groupe de vieux enfants d'après-guerre) et, surtout, comment ils vont nous financer. Alors, évidemment, on sort la culpabilisation. Les gens sont imprudents ou naïfs ou inconscients parce qu'ils ne planifient pas. Ce n'est pas vrai. En tout cas pas pour ce qui est de s'occuper de leurs affaires. En fait, les gens sont imprudents, naïfs et inconscients dans leur choix de gouvernants. Ils ne risquent pas. Ils n'osent pas envisager une société différente, axée sur le bien-être de tous. Et dans cette belle continuité de mensonges que l'on nous sert ad nauseam sans même prendre dorénavant la peine de les déguiser, on retrouve d'un côté les nantis et leur pécule, et de l'autre, les pauvres et leur bas de laine troué.
____________________
Notes cinématographiques : J'ai écouté hier soir le film Comment dresser votre dragon et j'ai succombé parce que ma petite Mignonne chérie est une copie conforme du dragon apprivoisé Croque-mou! Mêmes yeux verts adorables qui s'ouvrent dans un corps tout noir.

Notes bloggesques : Allez voir dans la colonne gauche du blog le lien que le Fils a fait pour le feuilleton clérical le plus enlevant du Web. Vous y retrouverez d'un clic toutes les aventures de Vanessa.

Notes maternelles : La Fille s'en vient. L'Homme et moi avons tué le veau gras cet après-midi. Nous l'attendons pour le souper. Nous essayons d'être indifférents!!!

vendredi 14 janvier 2011

Pervers effets secondaires

Depuis que j'ai senti l'épée de Damoclès me frôler dangereusement les cheveux, j'adopte des comportements nouveaux et étranges. Ainsi, je continue vaillamment de parcourir mes trottoirs chéris, mais je n'arrive plus à sentir le froid qu'il fait dehors. Je me branche sur le métal, plus salvateur que jamais, et, tel Forrest Gump, je me lance en avant. Et je n'éprouve plus rien. Le vent a beau me fouetter le visage, je le trouve rafraîchissant. Il devient comme un baume sur mes plaies. J'ai les doigts et les orteils gelés, mais je me répète que je vais me réchauffer en rentrant les mains dans mes manches et en accélérant le pas. Des fois, je voudrais ne jamais m'arrêter. Me rendre aussi loin que je le peux en restant dans ma bulle.

Bien que l'arme blanche ne m'ait pas coupé l'herbe sous les pieds, elle m'a quand même volé le clavier sous les doigts. Je ne suis plus capable d'écrire. Entièrement absorbée par les scénarios horribles que mon cerveau ne cesse d'élaborer, je suis devenue indifférente à ce qui se passe autour de moi. Je ne vois plus la vie. Ma source d'inspiration ne m'attire plus. J'ai cessé de prêter l'oreille aux conversations dans le wagon à bestiaux. Je fulmine à peine en lisant dans les journaux les plus récentes âneries de nos hommes politiques. Pire, j'attends le retour de la Fille avec un détachement que je ne me connais pas. Je suis totalement perdue dans une spirale sans fin. Je crois, par contre, que je n'arrive pas à duper les chattes de la maison qui mesurent bien toute l'étendue de mon désarroi. Résultat : elles ne me quittent pas d'un poil! Elles me poursuivent littéralement de leur sollicitude inépuisable. Dès que je m'assois ou que je vais me coucher, elles se blottissent contre moi, elles se mettent à ronronner très fort, me regardent et poussent des petits "rou, rou" plaintifs. Si elles le pouvaient, je crois qu'elles pleureraient avec moi.

Ce matin, en marchant pour me rendre chez le coiffeur, j'ai réalisé soudainement que j'étais victime d'effets secondaires plus graves encore que je ne me l'imaginais. C'est mon activité cérébrale, ou plutôt son absence, qui m'inquiète sérieusement. Depuis que j'ai été tétanisée à l'annonce d'une possible anomalie de mes totons, je pense avec grande difficulté. J'ai sans cesse l'impression de marcher dans un aquarium, d'être détachée du monde autour de moi. Quand je dois réagir à mon environnement, par exemple en essayant de cuisiner quelque chose ou en tentant vainement de réviser un texte au bureau (heureusement que j'ai Vanessa!), je dois faire un immense effort pour me concentrer et accomplir la tâche désirée. C'est sans doute la raison pour laquelle j'écoute davantage la télévision.

Et, insidieusement, les ondes sont venues bousiller un cerveau déjà fragilisé. Pour évaluer l'ampleur du phénomène, je n'ai qu'à m'arrêter un instant pour établir la liste pathétique des émissions que j'ai choisi de regarder ces derniers jours, soit en grande partie des jeux télévisés. Passe encore quand je succombe à Des chiffres et des lettres, ce quiz intellectuel de TV5. C'est sûr que je n'arrive qu'à former des mots de 5 ou 6 lettres pendant que les concurrents utilisent les 9 lettres du tableau et que je trouve uniquement les solutions pour les nuls quand il s'agit des chiffres. Malgré tout, s'il n'y avait que cet écart, je crois que mon organe à penser aurait été moins abîmé.

Hélas! Hélas! J'ai aussi visionné Tout le monde veut prendre sa place, un jeu-questionnaire présenté sur TV5 et animé par l'ineffable Nagui, et Atomes crochus, une émission absolument idiote du canal V! Moi, oui moi, qui se prétend une amante de la langue, je me suis mise à chercher avec les concurrents à compléter des phrases aussi simplistes que : Toutes les fois qu'il se présente à l'aéroport, Anatole déclenche le système de sécurité avec ... OU Brigitte adore les pompiers à cause de leur ... Vous imaginez tout de suite les associations hilarantes qu'il est possible de réaliser à partir de ces énoncés. Des heures de lavage de cerveau en perspective!

Hier soir, j'ai même pris la décision "éclairée" de me taper une autre émission du quiz Million Dollar Money Drop, là où deux concurrents tentent de conserver la somme de un million de dollars en répondant correctement à sept questions. Grosse mise en scène avec musique obsédante, éclairage tamisé et pauses publicitaires habilement placées quand les liasses de billets tombent dans des espèces de puits sans fond. Et comme dans toutes les émissions de ce genre, les concurrents ont été choisis parce qu'ils sont sympathiques ou carrément épais. Dans les cas que je citais au paragraphe précédent, je pouvais toujours plaider l'aliénation mentale puisque je me contentais de pitonner d'une chaîne à l'autre comme un papillon fou dans un champ de fleurs. Mais là, en entendant annoncer que l'émission allait commencer dans dix minutes, j'ai fait l'effort conscient de me rappeler du numéro du poste et de l'heure du début de l'émission. C'est la première fois depuis une semaine et demie que j'essayais de me rappeler quelque chose. C'est fort... oui, fortement inquiétant!

Je dois absolument sortir de ce cercle infernal avant de me laisser séduire par les télé-réalités. Me semble que c'est un pas que je ne dois pas franchir sous peine de perdre justement la réalité de vue!

dimanche 9 janvier 2011

La vie (ou la mort) au bureau - Jean qui rit, Jean qui pleure

(cinquième épisode du feuilleton clérical le plus populaire sur la Grande Toile - voir les épisodes précédents publiés les 6, 12 et 21 octobre, et le 11 novembre)

À cause de Vanessa et de la prime qu'elle avait reçue à son corps défendant en raison de la performance exceptionnelle de ce sosie censé lui rendre la vie plus facile mais qui ne faisait que lui apporter des ennuis, voilà qu'elle devait maintenant donner une fois par semaine des ateliers à ses collègues sur les pratiques exemplaires à suivre pour offrir un rendement optimal au travail! Horreur! Cauchemar! Mauvais sort! Elle détestait ça à un point tel qu'elle songeait nuit et jour à de nouveaux moyens de mettre fin une fois pour toutes à son association machiavélique avec la poupée gonflable aux gros totons et au sempiternel béni-oui-oui.

Même le succès remporté lors du party de Noël, où elle avait dû se présenter déguisée en Vanessa - barre oblique - Mère Noël et exécuter une danse poteau autour de la colonne centrale de la salle de conférence, n'était pas suffisant pour diminuer la haine viscérale qu'elle éprouvait maintenant envers sa complice d'autrefois. Au contraire! C'en était rendu qu'elle avait développé une terrible allergie au latex qui faisait en sorte qu'elle devait dorénavant porter des gants de coton pour déplacer l'objet honni du portemanteau le matin, à sa chaise le soir. Fallait que l'abcès soit crevé pour de bon.

Mais, mais, ce n'était pas aussi facile que cela en avait l'air de se débarrasser de la désormais rivale. Elle en avait fait la malencontreuse expérience dans un passé pas si lointain. Et tout ce qu'elle avait réussi à soutirer de ses sombres desseins de tueuse incapable de dégonfler le minable et détestable objet aux yeux de merlans frits, c'était d'avoir encore plus de boulot à accomplir. Ce n'est vraiment pas comme ça que les choses devaient se passer.

Elle avait bien songé à engager un professionnel pour réussir là où elle avait échoué. Les tarifs n'étaient pas donnés. Ainsi, elle avait un peu mal au coeur de penser qu'elle devrait investir tout le montant de sa prime au rendement pour éliminer Vanessa de sa vie cléricale. Dans l'espoir d'économiser quelques sous, elle avait donc donné rendez-vous au café du coin à un "entrepreneur" potentiel listé dans les pages jaunes sous la rubrique Clowns pour toutes occasions. Elle n'eut aucune difficulté à le repérer :


En apercevant l'hurluberlu, elle recula vivement d'un pas. Mais l'amuseur public attira aussitôt son attention avec un formidable "couac" de trompette. Elle n'avait plus le choix. Tous les yeux des clients ahuris étaient tournés vers elle. Le drolatique personnage lui faisait maintenant de grands signes de la main en agitant son chapeau melon en direction de la chaise vide à sa table. "Ayoye", pensa-t-elle en son for intérieur, "aurais-je atteint le fond du baril ou, pire encore, vins-je de passer de caraïbes en scylla?" "Salut, ma p'tite dame", lui tonna-t-il dans l'oreille. "Alors, comme ça vous voulez organiser une sauterie pour une amie très chère. Mais à quoi vous pensez au juste quand vous dites "Faut que ce soit sa fête!"?"
_______________________________
Notes de la Marcheuse urbaine : Un gros, gros merci à l'Amie Yogini pour sa suggestion de faire appel à Vanessa dans ma détresse, et merci à l'Homme, au Fils, à la soeur Psy, à la soeur du Milieu, à la Nièce littéraire et à l'Ami pour être là.

jeudi 6 janvier 2011

Va-et-vient

Je flotte sur un radeau depuis le début de l'année. Je me laisse aller à la dérive, la tête trop pesante pour même regarder où les flots me portent. Je suis comme dans un brouillard et je me fous un peu de tout.

J'ai un gros vilain rhume. Je tousse. J'ai mal à la gorge. Je dors difficilement la nuit parce que trop congestionnée. Quand je me lève de mon grabat, j'ai l'impression de marcher sur un sol qui bouge constamment. Ce doit être à cause du mouvement des vagues.

Je n'ai donc pas été sauver la planète depuis mon retour de Québec. Je suis plutôt restée confinée sous les couvertures cherchant un réconfort que je n'arrive pas à trouver. De toute façon, je peux à peine penser tellement je suis emprisonnée dans ma bulle morveuse. S'cusez-là mais c'est comme ça que je la sens!

En plus, l'Homme et moi avons été réveillés deux matins de suite par la Fille. À son premier appel, elle nous apprenait qu'elle n'avait toujours pas reçu sa nouvelle carte de crédit. Elle était donc sans le sou se demandant comment elle allait faire pour manger et où elle pourrait dormir. Je dois dire que cela m'a fait quelque peu sortir de ma torpeur. L'Homme et moi nous sommes activés une bonne partie de l'avant-midi à trouver une façon de lui envoyer des fonds allant même jusqu'à communiquer avec l'ambassade du Canada en Espagne pour savoir quoi faire pour venir en aide à une Chinoise démunie. Finalement, nous avons pu lui faire parvenir une somme suffisante pour lui procurer gîte et couvert pour un ou deux jours. À son deuxième appel, la Fille n'était guère mieux lotie. Toujours pauvre comme Job, elle attendait encore le miracle postal qui ne venait pas. Elle nous a appris en plus qu'elle était maintenant illégale parce que son séjour en Europe dépassait les trois mois et que son visa pour l'Espagne avait été volé en même temps que son passeport. Malgré mes recommandations, elle s'entêtait à poursuivre son périple. Suffisait, selon elle, que nous lui envoyions régulièrement des sous et qu'elle n'essaie pas de revenir en Espagne sous peine d'être peut-être déportée. C'est fou comme mon mal de tête s'est soudainement aggravé. Aux dernières nouvelles, elle songeait maintenant à revenir plus tôt que prévu. Nous attendons la suite des événements.

Après avoir passé une nouvelle nuit agitée, je n'ai donc pas été surprise d'entendre le téléphone sonner une troisième fois ce matin. Hélas! Pas de Fille au bout de la ligne, mais bien une infirmière de l'hôpital m'invitant à retourner me faire écraser le sein gauche mercredi prochain. Apparence qu'il faut une autre image, plus claire, plus précise. Ahhhhhhhhhh! C'est pas vrai. Moi qui travaillais très fort à adopter la zénitude totale malgré mon rhume carabiné, malgré la Fille en cavale, malgré la retraite qui approche trop vite, malgré le fait que je n'aurai pas ramassé un million de dollars avant de quitter mon travail comme les experts le recommandent maintenant, voilà que je devrai ajouter une vraie inquiétude à mes artères déjà trop tendues. Comme tout le monde, j'ai peur du verdict. Et j'attends.

Sur mon radeau, je flotte. Comme je voudrais m'y endormir paisiblement jusqu'à après.
_____________________
Notes pédestres : Je suis allée marcher. Je voulais me prouver que j'étais suffisamment rétablie pour faire acte de présence au bureau demain. Il faisait tellement beau. Une petite neige tombait. Et le soleil. Absent depuis le matin, il est brusquement apparu et m'a éclairée une bonne partie de mon trajet. Je l'ai accueilli comme un heureux présage. La lumière, c'est puissant.

samedi 1 janvier 2011

Tic, tac, tic, tac, en v'là une autre!

"Bonne année grand nez! Vous pareillement grandes dents!"

Je ne me souviens plus trop d'où viennent ces souhaits pour le moins politiquement incorrects mais je les trouve amusants et je vous les sers donc en guise d'introduction à ma troisième année de blogueuse invétérée.

Les derniers jours ont été l'heure des bilans pour la plupart des journaux que j'ai eu le temps de lire. J'imagine que c'est la fin de quelque chose qui nous met dans cet état d'esprit de récapitulation d'à peu près tout : les films, les livres, les spectacles, les coups d'éclat (il n'y en a pas eu beaucoup) politiques, les objets qui ont fait parler d'eux, les catastrophes climatiques, les personnalités qui nous ont quittés pour un monde meilleur, bref des palmarès parfois amusants, parfois plus tristes.

Les bilans, c'est sûr, ça permet de se souvenir. De réfléchir aussi. De prendre peut-être des résolutions pour entamer le livre dont on ouvre la première page aujourd'hui. Ça me rappelle la première journée d'école. Les premières lettres tracées dans mes cahiers neufs. Je me faisais toujours la promesse de les garder propres toute l'année. Évidemment, dès le mois d'octobre arrivé, la routine s'était installée. Les coins des pages commençaient à tourner. J'avais parfois effacé un peu trop vivement et les taches noires des crayons au plomb marbraient les dictées et les exercices.

Même chose pour le sentiment exaltant d'être la première à fouler la neige blanche fraîchement tombée. En raquettes, par exemple. Tu arrives dans un champ où c'est blanc à perte de vue. Pas de sentier déjà marqué. Pas même l'apparence du passage de petits animaux. Rien que la pureté virginale de la neige. Quel plaisir absolu de commencer le chemin qui sera ou non emprunté par la suite par d'autres amateurs! Quelle satisfaction aussi de regarder derrière soi après un bout de temps et de voir les pas qui indiquent désormais qu'il y a eu âme qui vive dans ce champ jusque là épargné de toute présence!

C'est toujours stimulant d'entreprendre quelque chose de nouveau. De vouloir faire les choses différemment. D'abandonner des comportements ou des habitudes qui ne nous servent pas et de les remplacer par des façons de faire qui répondent davantage à nos besoins. J'ai déjà écrit que je n'étais pas très forte sur les résolutions puisque je les abandonnais trop vite. J'ai quand même envie, en ce premier jour de l'An 2011, de regarder en avant et de penser au chemin que je voudrais parcourir dans ce champ encore vierge.

Je voudrais d'abord continuer à ne prendre que ce qui m'appartient pour me garder le plus possible la tête libre. Ainsi, je pourrai mieux m'occuper de moi et me concentrer sur ma santé mentale et physique. Je vais donc aussi, dans la mesure de mon possible, apprendre à lâcher prise. Juste ça va demander de gros efforts avec ma tendance exagérée d'attendre des choses qui n'arrivent jamais, des paroles qui ne sont pas prononcées et de vouloir également contrôler l'incontrôlable et prévoir l'imprévisible. Comme vous voyez, j'ai du pain sur la planche!

Belle note positive par rapport au plus sombre paragraphe précédent, cette année marquera la fin de mes années actives de travailleuse. En septembre, ce sera la retraite. Le temps enfin redonné à celle qui pourra dorénavant en disposer comme bon lui plaira. Et, avec cela, la possibilité, non pas de faire un bilan, mais plutôt une liste de toutes les choses amusantes que je voudrai faire dans les nombreuses (je l'espère) années à venir. Je suis au début de mon grand champ blanc à moi toute seule... hum... je chausse les raquettes ou je me précipite dans la neige tête première?
__________________________
Notes pédestres québécoises : C'était le printemps, comme. Tout fondait. Pas de soleil mais une température très douce pour un début janvier. Le métal dans les oreilles, j'ai pleinement profité de mon exercice pour me remettre des abus passés et me préparer aux excès de la soirée à venir!