dimanche 13 septembre 2015

L'année de mes 60 ans : La balançoire

Voilà un autre passage qui s'amène, celui de la soixantaine. Pour dire vrai, je n'ai pas vu passer les 59 dernières années, alors je m'inquiète sérieusement pour celles à venir. J'essaie bien de profiter pleinement du moment présent mais, toujours en ébullition, mon cerveau me bombarde continuellement de messages. Heureusement, grâce à la pratique quotidienne de la méditation, j'arrive parfois à goûter, oh! pas autant que je le voudrais, mais à goûter quand même la seconde qui passe, qui est déjà passée.

Je remarque que je suis souvent plus attentive à ce qui se passe autour de moi, en-dedans de moi. Je regarde. J'observe. J'écoute. Et je m'arrête. Oui, je stoppe parfois brusquement mes pas de retraitée en mouvement quasi perpétuel pour apprécier la lumière du matin, le chant d'un oiseau, l'odeur de la pluie qui tombe ou les cris des enfants dans la cour de l'école. Je m'émerveille d'apercevoir la pleine lune au travers des stores de ma chambre et, bonheur suprême, de profiter de sa lumière qui vient se poser sur mon oreiller.

Volontairement, consciemment, je m'immobilise pour sentir la vie. Je lève parfois la tête pour mieux sentir le souffle du vent sur ma joue. Je sors en pyjama sur le balcon le matin et je respire profondément en contemplant le quartier qui se réveille. Je peux passer beaucoup de temps à regarder les poissons s'amuser dans l'étang. Ou encore à admirer mes orchidées en fleurs avec leurs belles racines qui passent par-dessus le pot.


Je fais exprès de me planter devant la fenêtre de la cuisine pour emmagasiner à tout jamais dans ma mémoire horticole les couleurs du jardin. Je m'extasie devant mes plantes aquatiques. Je tombe en pâmoison en surprenant un couple de cardinaux dans les mangeoires.

Je ne sais pas si c'est l'âge mais il me semble devenir un peu plus gaga tous les jours. Moi qui ai toujours été sensible, voilà que j'ai maintenant la larme à l'oeil pour tout et pour rien. Je trouve que c'est pas vraiment de ma faute cependant, c'est la faute à la nature. Elle est parfois tellement belle, tellement vraie, tellement parfaite qu'elle me donne envie de pleurer. Quand je pense aux efforts que je déploie pour avoir un beau jardin alors que la nature, sans conseiller horticole, est capable d'habiller un fossé en bordure de la piste cyclable d'une variété de plantes à faire rougir la pépinière la mieux fournie en y ajoutant de surcroît la palette de couleurs qui convient. C'est tout simplement magnifique.

En tout cas, ce cerveau ramolli me joue parfois de beaux tours. Lorsque je suis allée arpenter mes trottoirs chéris l'autre jour, je suis passée au travers d'un parc où il y avait des balançoires. Comme je me préparais à rejoindre la rue de l'autre côté, j'ai ressenti une impulsion, un élan qui m'a poussée jusque sur la balançoire. Ça faisait drôlement longtemps mais je me suis dit pourquoi pas. T'es encore capable de te balancer quand même. C'est pas parce que tu vas avoir 60 ans que tu ne peux plus te lancer vers le ciel. Alors je l'ai fait. J'ai retrouvé le désir de me balancer le plus fort possible justement pour tenter de toucher au ciel. Comme lorsque j'étais jeune, je n'ai pas réussi. Mais quelle sensation quand même d'avoir l'impression de voler... un peu. Si j'avais poussé l'audace, j'aurais sauté en mouvement pour atteindre le sol au lieu de freiner avec mes pieds. C'est là que je me suis rendue compte que je n'avais plus 10 ans. J'ai pensé que je pourrais me casser quelque chose. J'ai choisi la sagesse. N'est-ce pas ce que je dois viser maintenant que j'entre dans un âge plus vénérable?

N'empêche. Cette folie passagère m'a permis de constater que mon coeur d'enfant battait toujours, ce qui est extrêmement rassurant. Et aussi que je ne devrais pas avoir peur d'écouter la petite voix qui m'incite encore à m'amuser, à rire, à profiter de la vie au max en faisant des choses bizarres, inhabituelles, insensées.

Aujourd'hui j'ai 60 ans. Je rends grâce pour la merveilleuse vie que j'ai eue jusqu'à maintenant. Je souhaite bien évidemment qu'elle se poursuive encore longtemps. Je me souhaite surtout la paix du coeur et la sérénité qui font en sorte d'apprécier le cadeau du présent.




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