samedi 18 mai 2024

Si le grain ne meurt

 


Je suis fascinée par le pouvoir de la nature. C'est sûr qu'au printemps, cette force vitale est encore plus visible. Comment imaginer que des plantes ensevelies dans la neige pendant des mois se réveillent soudainement et commencent à pointer le bout de leur nez? Comment les arbres font-ils pour savoir que c'est le temps d'envoyer à leurs bourgeons, déjà prêts, le signal de se développer et de se transformer en feuilles? Évidemment, c'est parce que nous vivons dans un climat comme le nôtre que je peux constater ces changements aussi étonnants et merveilleux. 

Vous savez quoi... quand je regarde ces images affreuses de la guerre qui sévit un peu partout dans le monde ces temps-ci, je vois quelquefois, en plus de l'horreur des morts de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, les quelques arbres qui ont échappé à la destruction et qui tentent de survivre eux aussi. Des fois, quand on nous montre une ville dévastée et que mon oeil s'accroche à ce que je peux facilement imaginer avoir été une allée de palmiers avant que l'humain se déshumanise, je pleure sur cette vie qui devait être belle, sur ces rues où il devait faire bon se promener en écoutant le vent et en sentant le soleil sur sa peau. 

Il m'en faut de la foi pour continuer. Oui, même si je ne suis pas victime d'un de ces horribles conflits. "La guerre, la guerre, c'est pas une raison pour se faire mal", comme disait les jeunes héros de La guerre des tuques. Et la guerre, elle ne se joue pas toujours à coups de canons. Non, la guerre, elle est souvent près de nous. Dans nos familles, par exemple. C'est subtil. Mais déchirant. Comme la vraie guerre quand les belligérants refusent obstinément de trouver un terrain d'entente et de faire la paix. Ils s'entêtent. Et c'est bien triste quand l'un d'eux voudrait faire la paix mais qu'il n'y a aucune écoute de l'autre bord. Quoi faire pour exprimer sa bonne foi? Quoi dire pour démontrer que notre coeur n'est pas si mauvais? Comment obtenir un début de pardon et de réconciliation si la porte est fermée à double tour? Est-ce qu'on peut avoir droit à l'erreur? Mais, surtout, est-ce que l'on peut recommencer sur de nouvelles bases?

Finalement, ces guerres, qui ne sont pas des batailles proprement dites, n'en n'ont pas moins des effets collatéraux semblables. Le dialogue est interrompu. Le conflit perdure car tout le monde reste campé sur ses positions. Y a-t-il des victimes? Mais oui. Ce sont les coeurs plus tendres qui, au bout d'un moment, se disent que c'est assez cette folie. Que ça n'a pas de sens que des gens qui, à défaut de s'aimer, se respectent, en arrivent là. Hélas pour eux, leur désir de paix n'est pas accueilli. Alors, ils pleurent souvent sur ce qui a été et qui, "si la tendance se maintient", ne reviendra pas.

C'est là qu'intervient ma foi. Celle qui me réconforte en me disant qu'il faut que le grain meurt pour que la vie se pointe de nouveau. Celle qui m'invite à traverser peut-être un long hiver. Celle qui me console en me disant de m'accrocher à l'amour que j'ai donné et qui ne peut juste pas ne pas avoir laissé de traces. Celle qui me permet de prier pour les personnes qui sont près de moi, et pour toutes les autres un peu partout dans le monde qui, chaque jour, vivent une souffrance intolérable. C'est l'espoir qui fait vivre. C'est l'espoir qui permet de voir, dans la plus minuscule graine, toute la vie qui s'y trouve.



1 commentaire:

  1. Quel beau texte inspirant. Comme toujours mon amie Marcheuse, tu écris vrai.

    RépondreSupprimer