lundi 21 août 2023

"Meilleur que la vraie affaire!"



C'est le temps des récoltes. Les fruits et les légumes nous tendent littéralement les bras. Les soeurs et moi avons donc décidé de cuisiner un bouilli pour recevoir papa en fin de semaine. Je propose de m'occuper du dessert. Après avoir pensé à différentes possibilités, voilà que me vient soudainement l'envie de faire une recette découverte pour la première fois alors que je travaillais à la direction des Langues officielles du ministère des Communications, à Ottawa. C'était dans une autre vie. Pourquoi tous ces vieux détails? Parce qu'en cherchant la recette hier dans le livre intitulé Recettes préférées du MDC/DOC Favourite Recipes (on est bilingue ou on l'est pas et, dans mon temps, la fonction publique fédérale était bilingue parfois à en être ridicule), j'ai eu un petit frisson genre comme dans les films d'horreur où tu pressens quelque chose que tu n'es pas certain d'identifier. Je vous le donne en mille : c'était cette fameuse nostalgie des temps anciens, du autrefois passé à la vitesse de l'éclair!

D'abord le livre de recettes. Un pauvre recueil mis en page et spiralé par des employés du Ministère afin qu'il puisse ensuite être offert en vente pour ramasser des sous dans le cadre de la campagne annuelle de Centraide. Je me souviens de l'appel à contribuer que nous avions reçu afin de recueillir suffisamment de recettes pour avoir un produit acceptable à présenter. Je me suis donc amusée hier à parcourir les pages en cherchant dans les recettes fournies les noms d'ex-collègues de l'époque. Je me sentais toute drôle. C'est comme si tout d'un coup je retournais en arrière. Maudit que j'ai eu du fun dans mon travail de fonctionnaire! J'y ai rencontré des gens extraordinaires dont certains sont devenus des amis très chers que je fréquente toujours.

Mais revenons à cette fameuse recette et à ces années où je travaillais aux Langues officielles. C'était dans les années 80. Nous formions toute une équipe de joyeux convaincus de notre mission qui consistait principalement à faire respecter la Loi sur les langues officielles au Ministère. Combien de combats avons-nous livré pour qu'une conférence soit offerte dans les deux langues ou qu'une publication destinée aux employés sorte simultanément en français et en anglais? Combien de réceptionnistes (ça c'étaient des personnes qui répondaient au téléphone pour toi et qui te remettaient des messages sur des petits papiers jaunes - une aberration aujourd'hui à l'heure des cellulaires et des boîtes vocales) avons-nous fustigé parce qu'ils ne répondaient pas dans les deux langues lorsque nous faisions nos enquêtes "anonymes" pour démasquer les récalcitrants? Nous étions des irréductibles Gaulois et nous ne manquions pas d'audace. Mes deux patrons profitaient même de l'heure du lunch pour espionner les bureaux de Postes Canada/Canada Post situés de l'autre côté de la rue où logeaient nos pénates. Cette agence avait le don de choisir des employés unilingues pour son comptoir postal. Invariablement, à la question "Est-ce que je pourrais avoir un timbre, s.v.p.?", ils répondaient "Sorry, I don't speak French!". Bam! On faisait une plainte au commissaire aux Langues officielles. On ratissait large.

Bon, la recette. C'est sûr qu'on a dû en discuter autour de notre café le matin. C'était mon moment préféré de la journée. On arrivait tous très tôt, certains pour éviter le trafic, d'autres pour être en mesure d'aller chercher les enfants à la garderie après le boulot. Nous, aux Langues officielles, on faisait le café pour tout l'étage. Oui, oui. Mon patron, qui vivait à Orléans by the beach et arrivait aux aurores, avait décidé de lancer ce projet qui nous permettait d'amasser des fonds pour notre lunch de Noël. Il prenait donc le temps de moudre le nectar divin pour nos trois cafetières qui offraient du café noir normal, du café décaféiné et du café avec une saveur. Il faisait aussi la facturation de nos "clients" tous les lundis. On dirait comme ça qu'on perdait du temps, que nenni!! Bien des petits et gros problèmes se réglaient autour de la table à café et de façon beaucoup plus efficace que par les voies officielles. C'était l'époque du "présentiel" même si on ne savait pas que c'était ça qu'on faisait. Tous les jours, on se racontait notre soirée, notre souper, les frasques des petits. On discutait de nos émissions de télé ou on parlait politique. On se donnait des trucs de bricolage, de jardinage, de ménage, d'élevage d'enfants. On fumait aussi, les cendriers directement posés sur les tables et les bureaux. Je me demande encore comment il se fait que je n'étais pas plus incommodée par la fumée, la force de l'habitude sans doute.

Je crois que c'est à l'occasion d'une discussion sur un éventuel "potluck" comme on disait alors que j'ai entendu parler du "Sex in a pan" pour la première fois. Oui, vous avez bien lu. Quand notre collègue nous a fait part de sa contribution au repas, nous avons tous éclaté de rire. "Qu'est-ce que tu dis là? Ça n'a pas de bon sens un nom pareil. Qu'est-ce qu'il y a au juste dans ce fameux gâteau?" Et de continuer avec toutes les allusions auxquelles nous pouvions penser, allusions toutes situées au bas de la ceinture bien évidemment. "Vous allez voir comme c'est bon ce dessert-là," nous répondait-elle. "Je comprends, avec un nom pareil, on ne devrait pas être déçu" qu'on rétorquait en se bidonnant de plus belle. Il a fallu attendre une semaine avant de pouvoir nous faire une idée. Est-ce que le nom de ce dessert n'était que fumisterie ou le gâteau méritait-il vraiment un tel libellé?

Elle a déposé le gâteau sur la table et a commencé à le tailler en morceaux. Faut dire que la présentation était belle. Il y avait du chocolat et de la crème fouettée. Une fois dans notre assiette, le gâteau révélait ses différents étages avec son fond de biscuit. Il fallait goûter maintenant. C'était onctueux. C'était moelleux. C'était sucré. C'était croquant. C'était aussi rafraîchissant parce que servi froid. C'est à ce moment qu'on a tous décidé que, finalement, c'était meilleur que la vraie affaire! À vous de juger maintenant. Voici la recette.



GÂTEAU "SEX IN A PAN"

1er étage

1 tasse de farine

1 tasse de pacanes ou de noix de grenoble en morceaux

1/2 tasse de beurre mou

3 c. à table de sucre

Mélanger les ingrédients et les presser dans un moule de 13 par 9 po. Cuire à 350 F de 15 à 18 minutes.

2e étage

8 onces de fromage à la crème

1/2 tasse de sucre à glacer

1 contenant de 500 ml de Cool Whip (dégelé)

Mettre en crème le fromage avec le sucre à glacer (utiliser une mixette) et ajouter le Cool Whip. Étendre sur la croûte refroidie.

3e étage

2 tasses de lait

1 paquet de pouding instantané à la vanille (4 portions)

1 paquet de pouding instantané au chocolat (4 portions)

Mélanger le lait avec les poudings en suivant les instructions sur les paquets et étendre sur le 2e étage.

4e étage

1 contenant de 500 ml de Cool Whip (dégelé)

Étendre sur le 3e étage

5e étage

1 carré de chocolat râpé ou (ma version) des bleuets frais

Couvrir le 4e étage du chocolat ou des bleuets. Réfrigérer jusqu'au lendemain. 


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