vendredi 1 avril 2011

Surtout pas un sermon sur la montagne

Pour vous raconter la suite (mais malheureusement non encore la fin) de mon aventure totonesque, je dois d'abord vous avouer que je suis devenue laboureur. Oui, j'ai décidé, pour ma santé mentale future, de creuser de nouveaux sillons pour faire face aux aléas de la vie.

En effet, les sillons que j'empruntais habituellement devant les mauvaises nouvelles touchant mon intégrité physique traversaient des vallées de larmes, de crises d'anxiété et de nuits partiellement blanches. Ils empruntaient évidemment des routes tortueuses parsemées d'embûches et faisaient inévitablement et inexorablement grimper ma tension artérielle. Inutile de vous dire que pratiquer ces sillons devenait pour moi un danger croissant avec l'usage.

Lorsque les coups du sort frappaient mais ne duraient pas trop longtemps, j'arrivais à m'en sortir même en parcourant des chemins ardus. Toutefois, quand la souffrance perdure pendant des mois, comme c'est le cas pour mon aventure totonesque, je crois qu'il faut trouver rapidement d'autres moyens pour survivre. Du moins, c'est la conclusion à laquelle je suis arrivée après plusieurs semaines vécues dans l'enfer de la mort prochaine et de l'angoisse quotidienne qui l'accompagne. Les sillons dangereux creusés inlassablement, je les connaissais amplement. Je savais aussi qu'ils ne m'avaient jamais été aussi utiles que je l'aurais voulu mais, comme de vieilles pantoufles, ils étaient confortables, débarrassés de roches et de pierrailles, et si faciles à suivre. Comment ai-je soudainement eu le sursaut de conscience nécessaire pour changer de cap? Je me le demande justement en vous écrivant ce message.

Ma première observation touche le temps écoulé entre l'annonce du début qu'il y a quelque chose qui cloche dans mon toton gauche et le rendu du diagnostic final. Ça fait trois mois aujourd'hui que je suis plongée dans cette aventure et je ne sais toujours pas à quoi m'en tenir. J'achète l'urne de sable dans laquelle je rêve de me lover pour l'éternité ou bedon le billet d'avion qui me conduira en France pour trois semaines de vacances? Dilemme. Dilemme. Mais, entre-temps, il faut continuer de vivre et, préférablement, dans une certaine zénitude. Nécessité fait donc loi.

L'autre facteur d'importance dans mon changement d'orientation repose sur ma spiritualité. Discours pas très à la mode de nos jours mais, que voulez-vous, je fais partie de cette génération élevée à l'eau bénite. Je ne m'en porte pas plus mal, merci. Avec les années, j'ai évidemment fait un peu de ménage dans les préceptes que j'ai reçus mais j'ai néanmoins conservé une foi inéluctable dans le message du Christ. J'aime assez l'idée de suivre une personne intègre et juste, animée d'un amour incommensurable de son prochain. Les naufragés des villes, Il connaît depuis fort longtemps et Il s'en est toujours fait proche.

Alors, j'ai prié. Au début, je voulais absolument guérir. C'est tout. Et je n'acceptais même pas l'idée de subir un quelconque examen, encore moins une intervention qui me transpercerait le toton. Et les bonnes choses sont arrivées à moi, une à une. Sans doute parce que j'avais le coeur ouvert. Je vous en livre quelques-unes. Un matin, c'est une prière que j'ai entendue à la télévision. Des mots qui me touchaient l'âme. Des mots qui, dès lors, m'ont accompagnée chaque jour. Puis, ce fut l'évidente nécessité de cesser de pratiquer une religion de superstition. Si tu m'accordes ceci, je te promets cela. J'ai mis un holà à ce marchandage enfantin. Enfin, ce fut la conscience de ma finitude et, par là, l'acceptation de la durée de ma vie sur Terre. Comprenez-moi bien, je n'appelle pas la mort. Mais je savoure pleinement la vie en sachant qu'elle aura une fin. Comme disait quelqu'un : "Nous sommes éternels, mais non pas immortels."

Et j'ai beaucoup travaillé aussi sur mon moi-même intérieur. J'ai réussi à garder mon énergie pour méditer plutôt qu'à la disperser pour oublier. J'ai fait face à la réalité. J'ai rendu grâce pour avoir la chance extraordinaire d'être entourée d'une famille aimante et présente, d'amis attentifs et dévoués. Et j'ai pris mes outils de laboureur pour m'en aller au champ. J'ai creusé hier matin les premiers sillons de mon nouveau chemin de vie. J'ai eu le toton écrasé et transpercé. Je n'ai ressenti aucune douleur. Là, je me repose sur des berges plus tranquilles en attendant la suite. Quand je regarde derrière moi, j'aperçois un long sillon fraîchement entamé. Je distingue les mottes de terre de chaque côté. Hé! que vois-je sur l'une d'elles? Oui, Mimi, qui me regarde avec un petit sourire moqueur.

1 commentaire:

  1. Ah! Mimi! Une petite bête de bon augure, finalement. Une preuve en chair, en os et en poils que l'Homme est là pour vous protéger, que votre maisonnée est des plus invitante pour la gent trotte-menu, et que votre aventure totonesque s'insère dans la continuité des saisons de la vie. Bravo! Vous êtes une source d'inspiration pour l'amie yogini que je suis.

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