mercredi 6 juillet 2011

De si petites choses...

Ce sont des mots ou des gestes qui, a priori, n'ont l'air de rien, du moins jusqu'à ce qu'ils reviennent vous hanter et même vous troubler. Ça m'arrive des fois. Comme en fin de semaine, à Montréal, où nous sommes allés prêter main forte au Fils qui déménageait. À un moment donné, l'Homme et moi avons pris le métro pour nous rendre au marché afin d'acheter la boustifaille pour le souper. Nous avons rencontré à la station un itinérant et son chien, tous deux assis contre le mur. Nous avons salué le monsieur et échangé quelques mots avec lui avant de laisser des sous dans sa vieille casquette posée par terre. Une fois à l'intérieur de la station, et sans nous être consultés, nous savions que nous essaierions de trouver quelque chose à manger pour ces deux pauvres hères. Malheureusement, nous n'avons pas réussi à dénicher le sandwich ou la boîte de bouffe à chien souhaités. Pas grave. En arrivant près de nos protégés, nous avons de nouveau engagé la conversation et laissé d'autres pièces. Comme je déplorais le fait que nous n'avions rien pour son chien, le maître a rétorqué : "Ne vous en faites pas pour lui. Il y a deux jours, quelqu'un m'a apporté un gros sac de plusieurs kilos de nourriture pour chien. C'est moi qui n'ai plus rien à manger. Il me reste seulement un oignon dans le frigo." Ces paroles ne se sont pas insinuées tout de suite dans ma tête. En fait, j'ai simplement accueilli ce cri du coeur sans même me rendre compte que c'en était un. C'est seulement le lendemain que, subitement, la gravité de ces paroles m'est apparue. Ainsi, nous considérons plus important de nourrir un chien plutôt qu'un homme. Comprenez-moi bien. Je ne suis pas en train de remettre en question le geste posé envers le meilleur ami de l'homme, au contraire. Vous connaissez mon amour inconditionnel des bêtes de tout acabit. C'est juste que j'ai soudainement trouvé la situation carrément intolérable, à en avoir presque la nausée.

Au cours de la même fin de semaine, pendant que je rangeais la vaisselle dans le nouvel appartement du Fils, c'est le début de ma décadence dont j'ai pris plus vivement conscience. Agenouillée par terre pour tenter de rejoindre le fond d'une armoire, je me suis aperçue que ma flexibilité commençait sérieusement à prendre le bord. Je n'avais jamais éprouvé jusqu'à maintenant de réelle difficulté à passer d'une position à l'autre mais là, chaque fois que je me relevais pour rincer ma guenille dans l'évier, je peinais à me remettre à genoux. "Il faudra donc que je travaille plus intelligemment à l'avenir," me suis-je dit pour mieux faire passer la pilule. Mais je n'étais pas au bout de mes peines, ni de mes constats. Quand est venu le temps de laver le haut des armoires, là encore force me fut de constater que je ne pouvais plus, comme autrefois, me lever debout sur le comptoir en m'agrippant sur le bord du lavabo. Je sais, je sais. Si cette pirouette n'était pas prudente dans ma prime jeunesse, elle se transforme en véritable casse-gueule maintenant que je suis décrépite. Malgré tout, je pouvais me rassurer en me répétant qu'on ne déménage pas tous les jours et qu'on n'a donc pas besoin de se transformer régulièrement en alpiniste de l'armoire. Le raisonnement a tenu jusqu'au lundi matin. Cette journée-là, le chauffeur du wagon à bestiaux, plutôt que de nous laisser sur le bord du trottoir, a choisi de nous débarquer dans la rue. Saviez-vous que la hauteur entre la dernière marche de la porte de sortie du wagon et le macadam est suffisamment élevée pour provoquer un malaise dû à l'altitude et à l'air raréfié? Bon, j'exagère peut-être un tantinet. Mais elle l'est assez en tout cas pour que je me transforme en vieille rabougrie qui doit se tenir solidement après le garde-fou pour se garder d'avoir l'air folle en posant le pied sur le sol. Le premier petit pas prudent d'une longue enfilade...

1 commentaire:

  1. Chère Marcheuse urbaine,

    Quelques mots peuvent en effet nous troubler. Hier midi, revenant d'une agréable promenade, nous avons entendu les paroles suivantes : la vie serait un jeu, ou une bataille, perdu d'avance.

    C'est drôle, moi j'ai toujours cru le contraire : en naissant, nous gagnons à la loterie de la vie, nous gagnons le privilège inestimable de vivre, de voir, entendre, gôuter, sentir, toucher, ressentir, rire et pleurer. Chaque moment est un cadeau, à nous de savoir les apprécier, chacun, à leur juste valeur!

    L'amie yogini ;-)

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