mardi 25 octobre 2011

Gardez vos lampes allumées

Oui, je vous conseille de ne pas souffler la chandelle car vous ne savez ni l'heure, ni le jour où vous pourriez vous retrouver pauvre comme Job. Je ne vous souhaite pas toutefois de devoir partager à un moment de votre vie le sort de ce pauvre hère. Je m'explique.

Je ne vous apprendrai rien en vous disant à quel point il est important d'être conscient de notre bonne fortune et, surtout, d'en être reconnaissant. Je dois avouer que cette attitude devient encore plus facile à adopter quand on revient d'un séjour au service de dépannage alimentaire de la paroisse.

Aujourd'hui, je suis carrément outrée et je dénonce. J'horripile cette société égocentriste qui n'a de cesse de s'admirer le nombril sans jamais relever la tête pour voir plus loin que son petit nez en l'air. Oui, je clame haut et fort que nous sommes tous devenus des champions de l'indifférence cantonnés dans notre confort de bourgeois arrivistes.

J'exagère? Vous voulez des preuves. En voici. Nous avons reçu ce matin la commande livrée par la banque d'alimentation, pauvre organisme tributaire de ses "généreux" donateurs. Je vous donne ci-dessous la liste de certains des articles que nous avions à distribuer aujourd'hui :

Des boîtes de biscuits amochées
Je vous le concède, cela n'enlève rien à la qualité du produit. Nous nous sommes même réjouis en constatant qu'on nous donnait déjà des biscuits des fêtes... de l'année dernière. Ouais, c'est ça. Les fêtes de 2010! Merci Père Noël!

Des cannettes de la boisson gazeuse brune (marque générique, bien sûr!)
Une denrée qui a sans doute été ajoutée récemment au Guide alimentaire canadien. Comme si ce n'était pas suffisant, certaines des cannettes étaient tellement gonflées qu'on aurait pu les utiliser comme cocktails Molotov! Des envies de passer à l'action? Pour les adresses, j'ai des suggestions.

Une tonne d'enveloppes de poudre
Pas de la poudre blanche qui permettrait d'oublier, non. Plutôt toutes ces sortes de préparations chimiques à la liste d'ingrédients aussi longue qu'une litanie de déclarations libérales vides portant sur la nécessité de démasquer la corruption. Je parle ici de ces "supposés" expédients de la vraie cuisine conçus pour aider le chef de la maison à préparer par exemple des sauces dauphinoises pour les pommes de terre, des sauces au fromage orangé pour les nouilles et des sauces brunes pour la viande faisandée. Sans oublier ce classique des mets nourrissants : le sachet "Ramen" pour ne pas le nommer. Mettez-y de l'eau bouillante et le tour est joué. Ramenez-en, on est capable d'en prendre.

Des fruits et des légumes "frais"
Là encore, si vous êtes pauvre, on considère que vous n'avez pas droit à la variété. Que diriez-vous de belles clémentines reçues il y a maintenant plus de deux semaines dans un état frôlant le compostage? Eh! bien, nous en avons encore et nous n'avons rien d'autre à offrir de ce côté. Pour ce qui est des légumes, vous pourrez vous jeter sur le sac de carottes parce que les piments, hum, sont atteints de tavelure avancée. Peut-être qu'en enlevant les parties pas belles vous arriverez à sauver deux ou trois lanières pour une trempette. Attendez. Je crois justement avoir vu une enveloppe pour préparer... du guacamole! C'est aussi ça, être pauvre. Vous n'avez pas le choix. Vous devez vous contenter de ce qui est là, privé du plaisir de manger ce dont vous avez vraiment envie.

Des articles "hétéroclites"
Il y en a toujours. Des affaires qui ne se vendent pas et qui sont donc envoyées aux banques d'alimentation. Nous avons en ce moment un tube de frangipane, des boîtes cabossées remplies d'une sauce blanche dont j'oublie le nom, un nécessaire pour douche vaginale. Oui, vous avez bien lu. Il y a de tout, mais surtout du rien, de l'inutile, du passé date, du pas bon et du pas toujours frais.

C'est donc seulement ça que les démunis méritent selon notre bonne société : les restants. J'ai tellement honte. J'arrête là, mais j'y reviendrai. J'aurai toujours un restant d'indignation pour monter aux barricades. Et vous?

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