lundi 5 décembre 2011

Enfin délivrée!

En prenant l'autobus aujourd'hui pour me rendre à mon cours de yoga, je me suis rendue compte en espionnant discrètement les conversations des fonctionnaires qui m'entouraient que la retraite me conférait un autre avantage notable : je suis délivrée à tout jamais des diverses activités de saison organisées dans les bureaux! Je jubile. Vraiment.

N'allez pas croire que je suis la représentante féminine de l'esprit chiche de Gratteux! Pas du tout. C'est plutôt qu'avec les années, une tendance malsaine s'était développée voulant que tous les employés, sans exception, fassent acte de présence au party de Noël sous peine d'être taxés de mauvais joueurs et d'empêcheurs de tourner en rond. Étrangement, lorsque j'ai fait mes premiers pas dans la fonction publique, je n'ai jamais senti de la part de mes superviseurs ce désir farouche de forcer les membres de leur équipe à s'amuser et à fraterniser sur commande. Ce n'était pas nécessaire. Nous avions du plaisir l'année durant. Noël représentait simplement une autre occasion de nous réunir et de partager un bon moment ensemble. Et puis, tout semblait si simple. Une rapide consultation ralliait tout le monde pour le choix du restaurant et de la date. Je ne me souviens d'aucun tordage de bras pour encourager fortement les récalcitrants à se joindre à la masse. Je vais utiliser une expression qui traduit mon grand âge : c'était l'bon temps!

Que s'est-il passé pour que l'approche du temps des fêtes en vienne littéralement à me donner des boutons sur le corps dans les dernières années de ma vie active de travailleuse? Noël a été récupéré. Il est devenu un critère de performance, un objectif de rendement, un coefficient d'efficacité. Il a été embrigadé dans les stupides grilles d'évaluation dont la fonction publique possède la recette secrète et éprouvée (ou devrais-je dire éprouvante?). Que dire en effet d'un gestionnaire incapable de rallier ses ouailles autour d'une activité aussi conviviale qu'une partie de quilles, un tournoi de fléchettes ou une compétition de go-carts (je n'invente rien ici)? Que penser d'un patron qui ne parvient pas à convaincre son monde de participer à un cinq à sept (même s'il sait pertinemment qu'il compte dans son effectif de nombreux jeunes parents pour qui la garderie n'attend pas) ou encore de se rendre dans un resto super dispendieux à l'autre bout de la ville (quand il devrait savoir que la plupart des fonctionnaires ordinaires n'ont pas les moyens comme lui de se payer un stationnement et qu'ils empruntent le transport en commun)? Il sera sévèrement jugé par les hautes sphères qui concluront automatiquement qu'il ne possède pas les habiletés nécessaires pour susciter le travail d'équipe. Ou encore qu'il n'est pas assez proche de ses employés, qu'il ne sait pas se mettre à leur diapason. Ces grandes instances déduiront aussi que le climat de travail doit en souffrir. Adieu donc productivité!

Pas étonnant que, pour éviter le couperet implacable, les patrons décident de passer au mode offensif en proposant des activités destinées à motiver leurs troupes. C'est là qu'entrent "en jeu" les compétitions et les tournois les plus loufoques. Malheur à ceux et celles qui ne sont pas attirés par ce type d'occupations dignes de l'école primaire! Ils devront travailler la journée des réjouissances s'ils ne veulent pas faire partie du groupe de fêtards, ou présenter une demande officielle de congé s'ils osent boycotter l'initiative du patron en restant à la maison.

Je vous l'avoue, je n'en pouvais plus. Je ne sais pas pour vous, mais moi je suis fort capable de travailler en parfaite harmonie avec mes collègues sans nécessairement avoir besoin de boire, de chanter, de danser, de dessiner, de bricoler ou de me déguiser avec eux. Qu'est-ce que c'est que cette fausse prétention de devoir faire copain-copain avec tout le monde au travail? Mes amis, je les choisis. Et contrairement à la tendance Facebook, je les compte sur les doigts d'une seule main.

Alors, fêter, c'est bien. Mais fêter quand on en a vraiment envie, c'est mieux!

2 commentaires: