jeudi 4 août 2011

J'ai faim

Je mange mon lunch en lisant le journal. Je tourne les pages et m'arrête sur les nombreux articles qui traitent des chutes de béton à Montréal. Comme c'est décevant de constater que personne parmi ces élus à qui nous confions l'avenir de notre société ne veut prendre la responsabilité de ce qui s'est passé. Tous autant qu'ils sont ne pensent qu'à une chose : leur belle image. Tous autant qu'ils sont ne carburent qu'à une chose : leur soif du pouvoir. Ils ne veulent donc pas perdre le vote des électeurs. Ils ne veulent surtout pas avoir l'air de cacher quoi que ce soit et pourtant... Ils refusent de dévoiler certains rapports, nient que des études aient démontré que la situation était sérieuse et que des correctifs devaient être apportés de façon urgente. Non! Selon eux, les experts mentent et les citoyens sont trop abrutis pour comprendre les analyses effectuées. Alors on multiplie les déclarations soi-disant rassurantes sur la sécurité absolue de nos infrastructures. Allez-y. Les cruches ne sont pas encore pleines!

Je prends une autre bouchée de salade et poursuit ma lecture. Un petit encart attire mon attention. Intitulé Somalie : la famine gagne du terrain, il nous apprend que les Nations Unies ont identifié trois nouvelles régions de Somalie comme étant en situation de famine. Ces régions s'ajoutent aux deux autres déjà déclarées le mois dernier. Je commence à mastiquer moins vite en lisant qu'une conférence de donateurs destinée à récolter de l'argent pour les victimes de la famine dans le pays a été reportée d'au moins deux semaines. Juste ça. Et pourquoi? Imaginez-vous que la conférence n'avait pas été programmée suffisamment à l'avance et que les chefs d'État ne pouvaient se libérer. Je pense qu'ils étaient en train de manger, eux. Faudrait surtout pas interrompre leur digestion. Quand on pense que plus de 2 000 personnes meurent de faim chaque jour en Somalie, on peut dire qu'il y a urgence de réagir. Selon de sombres pronostics, ce sont 2,2 millions de personnes qui risquent de mourir de faim. Et que faisons-nous? Pas grand chose. Nous ne sommes même pas foutus de tenir une réunion!

Là, je n'ai plus vraiment envie de terminer mon repas. Je suis dévastée par l'ampleur de la tâche. Il me semble que peu importe le geste que je pose, cela ne voudra rien dire. Cela n'aura aucun effet. La goutte d'eau à tout jamais perdue dans l'océan. Je me sens solidaire, mais totalement impuissante. Que faire quand les responsables de la guerre civile et, par conséquent, de la famine qui sévit, interdisent l'accès à la plupart des organisations humanitaires? À qui crier ma révolte? À qui adresser mon désarroi? Je peux faire un don, certes. Je peux aussi rendre grâce pour la nourriture dont je ne manque jamais et ne pas la gaspiller. C'est tellement peu et ça ne fait tellement pas disparaître les images des ventres gonflés des enfants qui se meurent.

Soudainement, j'ai faim. J'ai faim de justice. J'ai faim d'équité et de partage. J'ai faim de générosité, de solidarité. J'ai faim d'amour, de compréhension, de tolérance. J'ai faim de solutions permanentes et durables.

J'ai faim que la souffrance ait une fin.

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