mercredi 2 juin 2010

Rêve éveillé

J'ai trop de temps peut-être. Trop de temps pour penser. Trop de temps pour m'informer. Trop de temps pour m'interroger. Je l'ai déjà dit et je me répète : la conscience, ça use. Parfois même, ça tue.

J'en discutais justement aujourd'hui avec mon collègue de la plume française. Tous deux atteints d'une écoeurantite aiguë de la vie causée en partie, j'en conviens, par notre oisiveté prolongée, nous en sommes aussi arrivés à mettre le doigt sur une autre raison de notre baisse de moral. Oui, la morosité du climat politique, à toutes les échelles, semble nous rentrer dedans.

Je comprends que les affaires publiques n'intéressent à peu près personne. Mais, du même souffle, je ne comprends pas vraiment. Même s'il est vrai que cela demande un effort pour se tenir au courant des décisions prises par nos dirigeants, même s'il est vrai qu'il y a peu d'appelés pour défendre des idées nouvelles et beaucoup trop d'élus pour ressasser les rengaines ringardes du passé, même s'il est vrai que les choses semblent presque toutes couler dans le béton du manque de volonté, du cynisme et de l'escroquerie, nous devons garder l'espoir de pouvoir changer la grisaille de l'horizon pour l'éclatante lumière de la vérité.

Je rêve, je ne le sais que trop. Je rêve d'un pays où les citoyens allumés refusent de répéter les erreurs du passé. J'imagine un pays où tout le monde se préoccupe pour vrai des inégalités sociales, de la pauvreté, de l'éducation, de l'environnement, de la santé. J'utopise un pays qui valorise l'innovation, la créativité, la culture, les arts et, pourquoi pas, le nivellement vers le haut et l'échange de points de vue rafraîchissants et mobilisateurs.

Je vois du vert partout : des bicylettes, du transport en commun adapté aux besoins, moins de véhicules sur les routes. Je vois de l'orangé mur à mur : des gens qui prennent leur santé en main, des médecins qui acceptent de collaborer avec des thérapeutes spécialistes d'approches plus naturelles, des personnes qui font de l'exercice et qui s'alimentent correctement. Je vois du bleu pas juste au firmament : des voisins qui s'entraident et qui ne connaissent pas les chicanes de clôtures, des personnes à l'écoute des difficultés de leurs concitoyens et qui prennent les mesures nécessaires pour leur permettre de s'en sortir. Je vois du violet et pas dans les églises : les gens pratiquent leur côté zen et vivent en harmonie les uns avec les autres. Je vois du jaune éclatant comme le soleil, éclatant comme les yeux des enfants parce qu'ils sont heureux, parce qu'ils sont aimés, parce qu'ils fréquentent un système scolaire qui leur apprend leur langue et leur histoire, parce qu'ils peuvent jouer dans d'immenses parcs, parce qu'ils ont leur place à eux dans cette société idyllique. Enfin, je vois du rouge pour la passion qui anime tous les citoyens de ce pays rêvé.

Que disais-je déjà? Ah! oui, trop de temps pour rêver. Et, plus tard que tôt je l'espère, pas assez de temps pour voir le rêve se réaliser. Dommage que l'on ne se donne plus le droit de rêver. Loin d'être inutile et d'être confiné à l'évasion, le rêve permet aussi de créer dans l'imaginaire le possible à venir. Parce qu'il ne connaît pas de limites, il nous entraîne dans des contrées inexplorées et nous fait parfois découvrir des solutions originales. Si vous pensez que je suis dans la lune, chut! Ne me réveillez pas!
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Notes félines : Depuis quelques jours, ma petite Mignonne s'en donnait à coeur joie dans une des deux grosses plantes que je garde dans la maison. Il y avait sans cesse de la terre à ramasser autour du pot. Évidemment, impossible de la prendre sur le fait pour lui adresser quelques remontrances bien méritées... jusqu'à ce que je la surprenne hier soir, les quatre pattes dans le pot, en train de sauter pour essayer d'atteindre la fenêtre. J'ai compris. Derrière cette fenêtre, il y a des mangeoires pour les oiseaux, lesquels chantent à tue-tête pendant la journée et volettent d'une branche à l'autre du cèdre. Pauvre Mignonne qui entendait tout ce raffut sans être en mesure de constater de visu ce qui se passait. J'ai donc déplacé la plante pour installer une chaise près de la fenêtre. Qui vis-je s'y précipiter aussitôt? Mignonne, bien sûr, dressée sur ses deux pattes de derrière pour mieux voir l'action qui se déroule de l'autre côté de la fenêtre. Suffisait d'y penser!

1 commentaire:

  1. Oh, j'adore la note féline! Comme quoi il y a souvent une solution créative pour remplacer les remontrances ou la guerre. Ça me fait penser à mon grand-père qui, pour décourager les marmottes de s'attaquer à ses légumes, clôturait son jardin personnel et en plantait un autre pour régaler les siffleux!

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